Ces filles qui sont mannequins parce qu’elles n’ont rien trouvé d’autre à faire de leurs vies, ces filles bêtes qui sont conditionnées pour se sous-alimenter, ces filles qui ne ressemblent pas à des vraies femmes et qui pensent détenir la clé du bon goût, ces filles stupides qui ont interrompu leurs études faute de capacités intellectuelles…
Voilà ce que ça m’inspire.
Bien souvent, on entend et on lit de grosses inepties à propos des mannequins. La plupart des gens assimilent tristement le mannequinat à une forme végétative, à des personnes vivant en stand-by. Un peu comme si on avait mis le temps sur pause en attendant de savoir « quoi faire de nos vies », profitant de notre corps pour gagner de l’argent entre-temps. Soulevons un peu cette problématique, voulez-vous ?
Pourquoi devient-on mannequin ?
Beaucoup de mannequins sont tombées dans le métier « par hasard » : elles ont été repérées (par une agence ou un « scout »), ont tenté l’aventure et ont constaté qu’il était possible pour elles de gagner leur vie ainsi.
D’autres ont essayé de percer parce qu’elles avaient la conviction de réussir, et se sont donc débrouillées pour rentrer en agence. Que ça fonctionne, ou non, l’essentiel est de croire en son travail et de persévérer : travailler sa photogénie, son relationnel, son attitude en casting, sa tenue globale…
Le mannequinat est un métier qui nécessite beaucoup de sacrifices, d’efforts et de rapports humains. C’est un travail permanent sur soi et l’univers qui nous entoure. Nous sommes en permanence jugées, affichées, susceptibles de rencontrer quelqu’un pouvant nous embaucher. Être sérieuse, polie, correcte, disciplinée, soigneusement habillée… Autant de qualités à accumuler tout le temps pour mettre toutes les chances de son côté.
Devient-on mannequin parce qu’on est trop bêtes pour faire autre chose ?
Dans le métier, j’ai rencontré très peu de filles ayant une cervelle d’huître. Je vous invite à regarder plusieurs reportages sur le mannequinat, sur les coulisses des défilés et des shootings, si vous pensez vous aussi que les mannequins font ce métier faut de capacités intellectuelles !
La bande-annonce d’A Perfect 14, un documentaire sur les mannequins « grandes tailles »
À mon avis, ceux et celles qui croient encore à ce cliché se sont arrêté-e-s aux paroles d’une adolescente très jeune, venue d’un pays lointain et placée (plus ou moins contre son gré) dans un défilé haute-couture. Ces jeunes filles fragiles, qui ne parlent pas toujours l’anglais ni le français, sont parfois contraintes de voyager pour rapporter de l’argent à leurs familles. Elles sont loin d’être bêtes, mais elles sont, trop souvent, désespérées… Pour en savoir plus à ce sujet, je vous renvoie vers Le voyage d’une jeune top-model, un documentaire ARTE.
Lorsque les mannequins sont exposées à la télévision, à travers un reportage par exemple, elles savent qu’il est essentiel de véhiculer une bonne image. Quand on représente un créateur, par exemple, il est nécessaire d’incarner son état d’esprit et de ne pas ternir sa réputation. La tenue d’un mannequin (à la fois ses vêtements, sa posture, son éducation…) est une de ses principales qualités ; parfois, elles refusent même de parler aux médias pour rester dans leur « personnage » !
Beaucoup de mannequins sont des jeunes filles continuant leurs études en parallèle, entre deux séances photos ou grâce aux cours à distance. Certaines se lancent dans l’aventure juste après le bac, pour éventuellement entamer des études supérieures plus tard ; d’autres, comme moi, ont mené de front le mannequinat et l’université, pour se consacrer pleinement à ce métier une fois leur(s) diplôme(s) en poche.
Les mannequins se droguent et font la fête
Grosse ambiance lait-fraise et Haribo aux pyjama party VIP de Victoria’s Secret
Oui… et non.
Je ne suis pas de celles qui participent aux Fashion Weeks, vous l’aurez compris. Je ne connais pas grand-chose à l’univers des défilés, auxquels je me suis rarement frottée, et uniquement pour du prêt-à-porter.
L’univers haute couture est assez loin de ma vie professionnelle !
J’ai entendu des histoires glauques concernant certaines filles, mais je n’étais pas sur place : impossible donc de confirmer ou d’infirmer.
La drogue est présente dans le monde de la mode, comme dans d’autres domaines (la publicité, la communication). Impossible également de nier que malheureusement, certaines filles se rabattent sur des coupe-faim pour être capables de se retenir face aux buffets proposés lors des défilés ou séances photos, car elles prennent naturellement du poids rapidement. Mais il ne faut pas étendre ce triste phénomène à toutes les mannequins.
Le milieu de la fête et de la nuit est très présent : aux mannequins de choisir si elles veulent en faire partie. J’ai évoqué dans un article le sujet des promoteurs, je vous invite à y jeter un oeil ! C’est comme tout, il faut connaître ses limites : il est tout à fait possible de boire quelques cocktails en twerkant sur la piste ET d’être fraîche comme un gardon le lendemain. Les mannequins qui arrivent avec des cheveux parfum cendres froides, les lèvres bleuies par le vin rouge de la veille, sont celles qui ont oublié d’être raisonnables…
Le rouge à lèvres de Lorde pour MAC. : le camouflage anti-vin rouge idéal.
L’essentiel, c’est de toujours rester sérieuse et professionnelle, de ne pas oublier le travail sur lequel on doit enchaîner le lendemain matin. Je discutais l’autre jour avec une amie, mannequin depuis bientôt dix ans. On se disait que si ça se trouve, nos profils « tournaient » toujours car nous prenons soin de nous, et que notre hygiène de vie reflète notre professionnalisme. Nous faisons toutes les deux du sport, ne fumons pas (ou très peu), faisons la fête modérément, ne prenons pas de cuites, prenons du temps pour nous…
L’entretien du corps et du mental est primordial pour la pérennité d’une carrière de mannequin. Bien sûr, c’est tentant, à vingt ans, de se mettre la tête à l’envers ! Mais ça peut coûter cher plus tard…
Les mannequins ne parlent pas
C’est vrai que beaucoup de filles sont silencieuses, mais ce n’est pas le signe d’un manque de culture : dans ce monde-là, la discrétion est de mise.
Nous ne sommes pas nombreuses à avoir des projets artistiques liés à nos métiers de mannequin. Celles qui n’en ont pas, qui sont là pour vivre l’aventure et se faire de l’argent, suivent tout simplement le cours des bookings (jobs) et ne sont pas là pour s’afficher. Lors des interviews, elles restent laconiques. Il faut y voir une manière de se préserver, pas un manque de culture G !
« Penses-tu parfois qu’il y a plus à faire dans la vie que d’être vraiment, vraiment, ridiculement beau ? », se demande Derek Zoolander
L’aventure humaine du mannequinat
Elle dure plus ou moins longtemps selon les personnes. Certaines filles travaillent depuis des années, d’autres se sont arrêtées au bout de quelques mois… Pourquoi ? Les études les rattrapent, ce monde-là ne les intéresse plus, leur profil ne plaît plus aux agences, elles n’ont pas réussi à percer, etc. Les raisons sont multiples.
Comme tout métier, celui-ci comporte de bonnes et de mauvaises choses. On apprend beaucoup sur les autres et sur soi : chaque casting est un entretien d’embauche nous forçant à montrer le meilleur de nous-mêmes en quelques instants. C’est un travail personnel intense, bien loin du cliché voulant que pour être mannequin, il suffit de faire la gueule et de ne plus s’alimenter ! Il faut savoir prendre sur soi, être agréable avec les directeurs de casting, présenter son book, son agence, être ponctuelle, présentable, faire des heures supplémentaires, refuser des jobs et en accepter d’autres, dire oui à son agence, dire non…
On rencontre des filles venant du monde entier, des casteurs différents chaque jour, on va changer d’agence en fonction des tendances et des budgets. Je connais d’ancien-ne-s mannequins qui se sont reconverti-e-s dans un milieu artistique après leur carrière (longue ou courte) grâce aux nombreux contacts glanés pendant ces années !
Le mannequinat peut être une parenthèse, un moyen de se faire de l’argent entre deux diplômes d’études supérieures, une expérience à tester, un hasard sur lequel on décide de miser, ou encore une façon d’entrer dans un univers artistique dans lequel on peut puiser beaucoup de relations utiles pour l’avenir. Ce n’est pas une voie de garage pour jeunes filles influençables, minces et écervelées, c’est un vrai métier !
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