L’idée part d’une bonne intention.
Il y a quelques semaines, Madison Campbell, une militante américaine qui défend les victimes d’agressions sexuelles, a annoncé le lancement imminent du kit MeToo.
Son principe ? Permettre aux personnes victimes d’agressions sexuelles d’effectuer chez elles les premiers prélèvements en évitant ou en repoussant la case hôpital.
Pourtant, le projet fait débat.
C’est quoi le kit de prélèvements MeToo ?
Sur son site, le kit MeToo est présenté comme un outil contenant plusieurs accessoires permettant la collecte d’éléments biologiques suite à un viol.
Il est fondé sur l’idée que toutes les victimes devraient pouvoir reprendre le contrôle sur cet événement.
Conçu avec l’aide de biologistes, d’avocats et d’universitaires, et accompagné d’une application mobile, il contiendra des accessoires de prélèvement d’ADN et des sachets pour conserver des poils ou cheveux.
Madison Campbell explique au média américain Vox :
« Après mon agression sexuelle, je ne pouvais même pas me toucher, ni laisser quiconque toucher mon corps ou me consoler.
Nous pensons que relever ces preuves dans le confort de son chez-soi est un droit. »
Selon Campbell, au-delà de l’état de choc que peuvent vivre certaines victimes, le kit viendrait aussi répondre à des difficultés que rencontrent les personnes qui craignent d’être discriminées en raison de leur identité de genre, ou qui ont peur d’être en danger en allant voir les autorités, car elles n’ont pas de titre de séjour.
À ce jour, le prix du coffret n’est pas communiqué, mais déjà, l’entreprise démarche des universités américaines pour qu’elles le distribuent en masse sur les campus américains.
Aujourd’hui encore, 1 Américaine sur 6 serait agressée sexuellement pendant ses études et seules 10% d’entre elles porteraient plainte.
Cependant, les universités n’ont pas donné suite… et se sont même publiquement prononcées contre ce coffret.
Pourquoi le kit MeToo fait polémique ?
Pourquoi cet outil clé-en-mains et sécurisant pour les victimes serait-il nuisible ?
La procureure générale du Michigan Dana Nessel a pointé la dangerosité d’un tel dispositif.
Dans un communiqué de presse sans équivoque, elle accuse la créatrice du concept de « violer le Consumer Protection Act » en faisant croire aux gens que le kit peut remplacer les prélèvements effectués à l’hôpital.
Elle attaque également frontalement le marketing du produit en lui reprochant de faire son beurre sur la notoriété du mouvement #MeToo.
Une accusation qualifiée de « fausse et honteuse » par la créatrice du kit, qui a répondu être néanmoins ouverte à changer de nom si la demande se faisait pressante.
Dana Nessel enjoint Madison Campbell à mettre un terme à son projet pour le bien des victimes car selon elle, le kit trouve plusieurs limites :
- Il ne permettrait pas de collecter certaines preuves qu’un professionnel serait en capacité de documenter (hématomes, griffures, ongles, etc.)
- Certaines preuves d’une agression pourraient ne pas être relevées par la victime lors de l’autoprélèvement (par oubli, détresse, ou dans le cas d’hémorragies internes)
- Les kits devraient être pris en charge dans une chaîne de traçabilité difficile à garantir si une victime s’auto-prélève
- Le dispositif retarderait l’observation et l’accompagnement de la victime par des professionnels de santé et les autorités compétentes
- La procureure doute de l’admissibilité des preuves collectées par la victime : elles pourraient être jugées irrecevables dans le cadre d’une procédure judiciaire
Sur madmoiZelle, un policier nous avait prodigué des conseils pour porter plainte après une agression et son témoignage démontrait l’importance du respect de la procédure médico-légale pour que des poursuites soient possibles.
Et lors d’un événement pareil, il paraît logique de s’adresser aux personnes compétentes : te viendrait-il à l’idée par exemple de relever toi-même les traces d’un cambriolage chez toi ?
Le kit d’autoprélèvement après un viol, un coup marketing ?
Dans les faits, le kit s’avère effectivement moins complet que la prise en charge d’une victime à l’hôpital qui comporte également un test de grossesse, un test VIH, un examen d’éventuelles hémorragies internes, l’administration éventuelle d’un traitement et la documentation des blessures physiques.
Lors de l’examen médical, une multitude de preuves sont prélevées pour témoigner du fait que le rapport n’était pas consenti : cheveux, poils, sperme, blessures, sang, traces de lutte, etc.
Bien qu’elle soit assez méconnue, la procédure est très encadrée et demande d’être en prise en charge par des experts pour que sa recevabilité dans un tribunal soit garantie.
En France par exemple, il faut impérativement aller d’abord à la gendarmerie ou dans un commissariat avant de se rendre à l’hôpital.
Même si la prise en charge des victimes est encore loin d’être idéale, en France comme aux États-Unis, le kit MeToo risque de faire croire aux victimes qu’il remplace cette procédure légale, essentielle pour mener à bien des poursuites judiciaires.
Combien de femmes ou d’hommes risqueraient de passer à côté de leur seule chance d’obtenir justice à cause d’une communication malhonnête autour de ce kit ?
Combien de victimes s’infligeraient toutes seules ces autoprélèvements qui peuvent être traumatisants, pour qu’au final, tout soit jugé irrecevable ?
Contactée par Bustle, Madison Campbell s’est défendue :
« Nous sommes une petite boîte tenue par deux femmes à Brooklyn. Tout ce que nous voulions, c’était créer une solution qui aiderait les personnes ayant subi un viol, mais ça a pris des proportions folles. »
Il aura fallu moins d’une semaine pour que plusieurs procureurs et associations de défense des victimes se prononcent publiquement en défaveur du kit MeToo.
Le point de tension principal semble être autour du marketing du kit, qualifié par ses détracteurs d’illicite.
De son côté, Madison Campbell se dit prête à ouvrir le dialogue avec les procureurs, les groupes de survivants et les alliés de la cause pour mener le projet à bien.
Avant même d’être commercialisé, le kit est en tout cas déjà sur la sellette.
Il représente le symptôme d’un problème global dans nos sociétés : à l’heure actuelle, la majorité des personnes victimes de violences sexuelles n’est pas ou est mal prise en charge par les autorités.
Mais n’y a-t-il pas d’autres manières de combattre ce phénomène ? Quelles solutions faudrait-il mettre en place selon toi ?
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Les Commentaires
Un kit de viol ne se garde pas chez soi au cas où. Un kit de viol n'a aucune valeur légale (comment prouver que le poil elle ne l'a pas récupérer ailleurs?) et va induire la personne en erreur (Ah oui j'ai fais mon kit je n'ai pas besoin d'aller à la police ou d'y aller rapidement). Un kit de viol ne verifie pas si tu as des lésions ou des MST.
Sans compte qu'essayer de se faire de l'argent sur le viol de quelqu'un c'est infect.