Les coups durs, ça arrive. Qu’ils aient une source concrète du genre décès parmi les proches ou rupture, ou qu’on réussisse moins à mettre le doigt dessus, ils nous tombent sur le coin de la gueule sans prévenir et viennent compliquer un peu notre vie et nos rapports aux autres. Nul. C’est NUL.
Quoique, après tout, qu’est-ce qui nous dit que ce passage à vide plus ou moins long n’est pas synonyme de quelque chose. Faut-il en profiter pour se remettre en question, pour se demander par exemple si on a choisi la bonne formation à l’école ou la bonne couleur de cheveux ? Peut-être. Peut-être pas, mais peut-être.
Personnellement, je sais que ce genre de coup de mou a toujours fini en carrefour et j’ai forcément décidé de changer un truc, mais peut-être bien qu’il faut juste parfois, accepter l’idée que notre cerveau va trop vite pour nous et concevoir de vivre un peu au quotidien. Cueille le jour, c’est une marguerite pleine de pollen, tout ça tout ça.
Après avoir passé quelques semaines à geindre façon « j’ai pas faim, j’sais pas ce que j’ai. J’ai pas l’inspi, j’sais pas ce que j’ai. Je souffre d’inconfort vaginal, je crois que je suis enceinte. Ou que j’ai le cancer. Putain, c’est la merde », j’ai décidé d’arrêter de me tripoter le jong que je n’ai pas et de lutter contre l’ambiance digne d’un album de Morrissey qui faisait rage dans ma tête. Le tout avec des techniques toutes simples que je brevette derechef.
Comme je me dis qu’on est toutes potentiellement sujettes à ces mini-crises personnelles, j’ai pensé que ce serait con de pas partager nos petits trucs bien à nous histoire de mettre un concombre sans corps gras dans les fesses de la déprime.
Benedict Cucumber me regarde méchamment, rapport qu’il n’a pas très envie de se retrouver dans l’anus d’une déprime.
Suer un bon coup dès le matin
Après m’être bien lamentée tous les matins jusqu’à être trop en retard pour partir au travail à pied, j’ai sorti mes baskets poussièreuses du dessus de mon dessus de placard parce que dis, elles m’ont coûté 25€ et je suis pas du genre à m’endormir sur mes sous. Personnellement, je me contente de marcher vite, parce que j’ai le souffle d’un citron anémique, mais si tu es un peu plus sportive ou plus radasse de la transpiration, tu peux carrément courir ou faire du vélo. Moi je m’y tente pas, c’est pour les barbares cette histoire si tu veux mon avis.
Et puis surtout, ça fait du bien : c’est assez rassurant de savoir qu’entre le lever et le moment où tu rentres dans l’amphi ou ton open space, tu pourras avoir un moment à toi, rien qu’à toi, sans ton chat, ton mec, ta meuf, tes colocs, personne.
T’as juste à enfiler tes pompes, prendre des sandales de rechange et t’asperger d’un déo bien efficace, mettre la playlist de ton choix dans tes tympans et marcher en oubliant que le reste du monde existe.
Moi ce matin, ma playlist c’était ça : des chansons pas trop optimistes parce que ça me donnerait envie de tuer des gens en leur criant d’arrêter d’être heureux, mais un peu quand même :
(La version Grooveshark pour les non-spotyfiennes.)
Dans ces moments-là, je pourrais croiser mon père que je le verrai pas tellement je n’ai de regard pour personne, pas même les voitures qui me laissent traverser (pardon, normalement je suis polie). Le reste du monde n’existe pas : tout le monde est mort. Ça fait vachement de bien.
Équilibrer les mauvaises nouvelles
Qu’y a-t-il de plus efficace que de faire des tours de passe-passe à son cerveau pour faire passer la pilule des annonces qui font chier. Prenons un exemple tout bête : tu viens d’apprendre que le chien familial était mort. C’est triste. Laisse à peine le temps à ta tête d’assimiler l’information et balance-lui une nouvelle donnée, du genre : le boulanger était de super humeur ce matin.
Ça n’arrange rien aux problèmes, certes, mais cet automatisme me permet de faire maigrir d’un coup la boule dans la gorge incoming en lui faisant bouffer que de la salade. Ça vaut ce que ça vaut.
Troller son estomac
Parmi toutes les périodes d’angoisse plus ou moins sévères, j’en relève deux extrêmes : celles où on mange en masse, et celle où on n’a aucun appétit. En plein dans une de celles-là, je trolle mon estomac : tu veux rien te prendre parce que je me trouve nulle ?
Rien à péter : je me fais un truc que j’aime vraiment à manger, reste coite devant mon assiette quelques instants et à chaque pensée négative sur moi-même, je me force à prendre une bouchée. Jusque-là, l’automatisme est toujours assez vite revenu jusqu’à me permettre d’atteindre la satiété (la vraie).
Je suis un tel génie, ça me donne le vertige.
Décomplexer sur la déprime
On est humaines, merde. Alors oui, bien sûr, on peut se dire que l’herbe est toujours plus aride ailleurs et qu’il y a des gens qui souffrent vraiment partout dans le monde, mais feuque. On a tous nos failles (moi-même, j’en ai deux au niveau de la poitrine puisqu’elle est concave) et si on déprime un coup, c’est qu’on en a besoin pour rebondir tel un ballon sauteur lancé sur le terrain de jeux de la vie.
Car comme te le disait la formidable Hippie Jack, première sur l’aide aux défavorisées temporaires de la bonne humeur, rien ne sert de se comparer aux autres. Alors si tu sens que tu as un coup de mou, te rajoute pas encore plus de pression en te disant que tu n’as aucune légitimité à ne pas être toujours enthousiaste comme un gourdin dans un champ d’abricots.
Tirer le meilleur parti de sa merde
Aussi vrai que les ongles d’orteil ne sont pas contre-nature, la déprime n’est pas forcément contre-productive. Je dis pas qu’on sort le meilleur de soi-même, je dis pas non plus que c’est comme une tourista et qu’on en sort que du mauvais. Y a juste moyen d’en retirer quelque chose.
Genre, se poser, réfléchir à tout ce qui fait qu’on a les miquettes et les fesses qui tressautent, puis l’écrire sur papier libre boîte postale SLIP ou dans un document Word que tu supprimeras plus tard, de la façon que tu veux. Après si t’as de la chance, tu le relis et tu réalises soit :
- que finalement, tu as toutes les cartes en main pour régler tout ça fissa,
- que tu peux t’en inspirer pour faire une nouvelle, un dessin, une paire de chaussettes imprimées ou que sais-je encore.
Parce que quitte à se bouffer les ongles jusqu’au string, autant prendre un peu de recul. D’autant plus que ça fait très artiste, de dire que tu crées une oeuvre éphémère à partir de ta lose passagère.
Comprendre que ta parole a un sens
C’est bon, on a compris : tu es une oreille attentive et une épaule compatissante. Tu es une amie en or plaqué parce que le vrai ça coûte cher, une amie pour laquelle les gens se battent en s’arrachant leur chemise et en grognant. Oui, tu es un sac à main en promotion. Une pièce haute-couture bradée.
Mais maintenant, que les choses soient bien claires : ton cérumen a une certaine valeur, mais ta salive aussi. En d’autres termes, écouter les autres se confier, c’est bien, mais tu as le droit de faire l’inverse de temps en temps. Si. Je te jure.
Et même si tout ce que tu as à dire c’est « je sais pas ce que j’ai, mais c’est pas trop la frite », ça marche aussi : ce que tu dis aux personnes de confiance, ce que tu ressens, a son importance.
Ça a l’air tout con à dire, mais les meilleures confidents sont souvent les pires confieurs alors faut se le rappeler de temps en temps. Moi, je me le rappelle tous les jours. J’en fais rien, mais je me le rappelle.
Fais confiance au monde, personne ne va revendre tes informations à Public. C’est pas trop simple à mettre en pratique, parfois, mais ça peut faire vachement de bien de s’épancher – quand on en a envie, du moins.
Et toi, quelles sont tes méthodes pour pénétrer sans sensualité la déprime passagère par le nez ?