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Publié le 19 avril 2018 — Le pire conseil qu’on ait donné à Simin Nouri ? J’ai oublié de le lui demander. Mais il y avait tellement de « pires » dans son histoire, que je ne voulais pas en rajouter, je crois.
Un peu de contexte : Simin Nouri est née et a grandi en Iran. Elle y fait de brillantes études, qu’elle complète en France, parce que sa mère tenait à ce qu’elle aille à l’étranger. L’équivalence des diplômes lui fait choisir Les Beaux Arts et les Arts Déco, en France.
Lorsque Simin retourne en Iran, son diplôme en poche, une révolution a eu lieu. Les Mollahs ont pris le pouvoir, et ils ont déjà verrouillé le pays.
Je pense à la claque que j’ai prise la première fois que j’ai été frontalement victime de sexisme, mais c’était rien comparé à ce que Simin me raconte de son entretien d’embauche.
Simin Nouri : « mon pays ne voulait pas de moi »
Elle veut enseigner l’architecture, on lui répond qu’aucun homme ne voudra d’une femme comme professeur.
Ses interlocuteurs refusent de serrer la main qu’elle leur tend pour les saluer, lorsqu’ils se rencontrent. Ils ne serrent pas la main des femmes, vous comprenez.
Non. Elle et bien d’autres ne comprennent pas, n’acceptent pas. Huit mois passent et Simin ne parvient pas à trouver du travail, alors sa mère la renvoie en France, où elle pourra étudier, travailler, s’installer.
Elle ne reviendra jamais en Iran, parce que la situation politique n’a pas évolué. C’est toute la société qui en souffre, bien sûr, mais les femmes en particulier.
C’est ce que me raconte Simin Nouri pendant une heure : d’où elle vient, et ce qu’est devenu l’Iran. C’est pourquoi j’ai un peu perdu le fil de mes questions habituelles.
Ma rencontre avec Simin Nouri
J’ai rencontré Simin Nouri lors d’un déjeuner organisé par la FEMO, la Fondation d’études pour le Moyen-Orient.
Elle était accompagnée de Farideh Karimi, présidente de l’Association Internationale des Droits Humains des Femmes (AIDHF), et de Mojgan, une iranienne ayant réussi à fuir le pays. Elle était dans l’attente de l’obtention du statut de réfugiée.
De toutes les trois, Simin était celle qui parlait le mieux français — quasi-impeccable, comme vous l’entendrez. Mojgan ne le parlait pas du tout, Simin faisait la traduction.
J’ai écouté les témoignages et les commentaires de ces trois femmes impliquées pour l’évolution politique de l’Iran, tout en me demandant comment j’allais pouvoir relayer leur message auprès des lectrices et des lecteurs de madmoiZelle.
J’avais juste envie de leur tendre un micro, et de les laisser raconter tout ce qu’elles étaient en train de nous raconter.
C’est pourquoi, à la fin, j’ai demandé à Simin si elle accepterait de venir dans ce podcast, de me raconter sa propre histoire, et à travers elle, un peu de celle de l’Iran.
Shownotes : Simin Nouri et l’Iran
Simin Nouri est architecte, docteure en histoire de l’Art, présidente de l’Association des Femmes Iraniennes en France (AFIF), ainsi que membre du Comité de Soutien aux Droits de l’Homme en Iran (CSDHI).
Elle signe un article publié dans l’ouvrage collaboratif Où va l’Iran (et non pas Où en est l’Iran comme je le dis dans le podcast). Il présente un état des lieux politique, social, religieux, économique de l’Iran.
La contribution de Simin Nouri est focalisée sur la violation des droits humains, parmi lesquels, ceux des femmes.
Où va l’Iran, sur Amazon
Simin Nouri me cite deux activistes en particulier :
Golrokh Iraee : elle est en grève de la faim, emprisonnée pour avoir écrit un article sur la lapidation en Iran. L’article n’a jamais été diffusé, elle a été arrêtée pour l’avoir écrit. C’est une prisonnière politique.
https://twitter.com/hrw_fr/status/983647932116332544
Human Rights Watch demande sa libération.
Maryam Radjavi : elle a été élue présidente du Conseil national de la résistance pour la période de transition, par le Conseil de la résistance iranienne.
Quelques grandes lignes sur la chronologie politique iranienne :
Simin Nouri me raconte que ses parents étaient pro-Mossadegh : c’était le premier ministre en exercice dans les années 50, lorsque l’Iran était encore une monarchie.
Le Shah d’Iran, Mohammad Reza Pahlavi, est chassé par une révolution en 1979. L’ayatollah Rouhollah Khomeini était en exil, il revient en Iran, déclare la fin de la monarchie et profite de sa grande popularité pour s’installer au pouvoir.
L’ayatollah Khomeini institue une République islamique, qui n’a de République que le nom.
C’est à cette situation politique que Simin est confrontée lorsqu’elle tente de rentrer en Iran après avoir terminé ses études en France.
Khomeini meurt en 1989, lui succède alors Ali Khameini.
En 1997, un religieux modéré est élu : Mohammad Khatami. Les tensions sont de plus en plus fortes au sein de la société, entre les attentes de réformes et d’ouverture d’un côté, et la pression des conservateurs et des religieux de l’autre.
Le pays reste aux mains des Mollahs. Les conservateurs l’emportent, avec l’arrivée au pouvoir de Mahmoud Ahmadinejad.
Depuis 2013, le président iranien est Hassan Rohani, et la situation du peuple iranien ne s’améliore pas.
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Les Commentaires
J'adore l'optimisme et l'enthousiasme de Simin à la fin, on sent son espoir d'une vie meilleure pour ses compatriotes et que la libération de l'Iran ait un impact sur la région au complet, et même le monde !
J'écoutais ça et j'avais en tête l'image du tableau la liberté guidant le peuple
Merci Clémence et Simin pour l'inspiration