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Mon papa est éducateur sportif en écoles primaires. Avant ça, il était maitre nageur. Ah oui, et il est aussi cycliste en mode tour de l’Ardèche en vélo pendant une semaine en plein mois d’Août. Autant dire qu’il a le mollet ferme et une endurance de marathonien, du haut de ses 55 printemps. Il devait penser intérieurement que sa fille unique hériterait à 100% de ses gênes de sportif aguerri. Sauf que la vie en a visiblement décidé autrement. Récit d’une longue lutte entre les ambitions inavouées de mon père, l’effort sportif et moi-même.
Sous la pression parentale
Il n’a pas fallu attendre mes 2 ans pour que mon père me colle dans le petit bain après les horaires d’ouverture de la piscine où il travaillait. Trois ans plus tard, je commençais la danse moderne. Deux ans encore plus tard, la chose que tout enfant de prof redoute : j’ai eu mon père en cours de sport.
Alors que tous mes petits camarades me vannaient à coups de « Haaan c’ton père, j’suis sûr il va t’aider », lui n’en avait clairement rien à foutre de ma poire. En natation, quand il tendait la perche aux autres dans le grand bain pour éviter une potentielle noyade, il me la retirait quand venait mon tour. En athlétisme, il ne me regardait pas courir. Une sorte de pression en mode « épate-moi pour que je te remarque ».
Au collège, tous les week-ends il m’emmenait faire 10 bornes de vélo dans la forêt, décidé à me faire découvrir LE sport qui me ferait vibrer. Il y aurait eu un club de Curling dans le coin, il m’y aurait envoyée, de gré ou de force.
En 4ème à une réunion parents-profs, mon prof de sport a sorti à ma mère « Je crois que Florie a des problèmes psychomoteurs ». Ça a marqué ma mère au fer rouge, mais ça a surtout fait rire TRÈS nerveusement mon père (qui bien sûr connaissait le-dit prof de sport et a du le mettre par la suite au courant de ma non-sportivité). A 14 ans, j’ai arrêté la danse à la suite d’une élongation du quadriceps droit : j’ai alors découvert que j’avais pourtant des muscles, mais que manifestement je n’étais pas programmée pour savoir les utiliser. En Seconde, j’ai commencé le tennis… que j’ai arrêté au bout d’un an. Au lycée, tous les profs de sport connaissaient mon père et n’en pouvaient plus de me charrier. Après une foulure au poignet en faisant du volley avec un ballon en mousse, mon père est parti définitivement déposer une fleur sur la tombe de mes exploits sportifs.
Le paradoxe de la sportive télévisuelle
Le paradoxe est là : j’aime le sport. Je suis toutes les compétitions de sport à la télé sans exception ou presque, je suis avachie avec mon père devant le Tour de France tous les étés, quand Roland Garros pointe son nez je ne suis qu’excitation (l’année dernière, j’ai mis France 2 toutes les aprem’ à la rédac’ pour suivre) et mon fantasme ultime serait d’avoir une place pour une journée aux Jeux Olympiques de Londres de 2012.
Pour moi, entre le cul dans le canapé et le cul sur une selle de vélo, y’a pas photo. C’est comme un chocolat Côte d’or et un chocolat Leader Price : le premier je le savoure, le deuxième j’en sue des gouttes de sang pour terminer.
J’ai envie d’en faire, du sport, pour entretenir mon p’tit corps, pour avoir le cuissot ferme, pour s’évader et se changer l’esprit, pour ce fantastique plaisir de courir transpirante sur un stade bercé de soleil rempli de beaux athlètes. Pour faire plaisir à mon père aussi un peu.
Mais systématiquement au bout de 5 minutes d’effort, je crache mes poumons, mon œsophage n’est plus qu’un vaste brasier, je suis paralysée par les crampes (j’ai des crampes aux mains alors que je cours, j’ai JAMAIS compris la relation), l’acide lactique semble avoir remplacé l’intégralité de mon sang et les battements de cœur résonnent en dolby surround dans ma tête.
Alors comme ma volonté bien est là mais que physiquement je ne m’en sors pas, je préfère tout mettre sur le dos de la génétique : quelque part dans mon ADN est gravé « plutôt s’immoler que de la laisser courir sans qu’elle s’étouffe après 8 minutes d’effort ».
La révélation
Il a souffert en silence pendant toutes ces années. Ravalant sa fierté devant cette fille unique qu’il avait engendrée, et qui n’était pas capable de montrer ne serait-ce qu’une once de capacité sportive. Accablé par toutes nos connaissances communes qui ne comprennent pas comment cela peut être possible.
L’abcès a été percé il y a quelques semaines, à table, devant la télé qui devait diffuser un banal reportage sportif. Dans un demi fou-rire nerveux, il m’a sorti ces mots : « Ça te saoulait tout ça hein ? T’as jamais aimé ? – Quand je te voyais lutter dans la piscine, j’arrivais pas à garder mon calme, c’est pour ça que je te refilais à l’autre maitre nageur »
. J’en ai lâché ma fourchette. J’ai juste su lui répondre « bah ouais – bah non » tellement j’étais émue. J’ai percuté qu’il lui a fallu 20 ans pour lâcher le morceau.
Mais encore maintenant, il ne peut contrôler quelques remarques du style « Alleeez, monte les marches en serrant les fesses là ! » , « R’gardez moi ces cuisses, c’est pas très ferme tout ça » ou « Tu pourrais y aller à pieds hein, ça te fera marcher ! ». Et je m’exécute la plupart du temps, étant évident qu’il a entièrement raison. D’ailleurs quand je serai vieille et ridée, mais la cuisse ferme et les fesses rebondies, j’irai chercher ma colle à dentier à la pharmacie à pieds et je penserai très fort à mon papa.
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Les Commentaires
Mais y a un truc qui me dérange dans cet article, c'est les commentaires de son père sur son corps, visiblement pas assez ferme à son goût... Mwerf, j'aime pas des masses