Il y a 4 ans que j’ai découvert ce qu’était une migraine. Je connaissais les maux de tête, classiques, parfois incroyablement douloureux, mais à mille lieues de ce que provoque la plus douce des migraines.
Un matin, au réveil, des éclairs m’ont vrillé les yeux. Inquiète, j’ai filé faire un tour à l’hôpital pour m’entendre dire deux choses : non, je n’allais pas devenir aveugle. Mais oui, il y avait bien quelque chose qui se préparait : oh, trois fois rien. Pas la peine d’en discuter quelques minutes, ces éclats lumineux ne faisaient qu’annoncer des migraines ophtalmiques. Allons, pas de quoi en faire un plat, 50 euros, patient suivant. Bon.
Quelques mois plus tard, ça n’a pas manqué. La première fois, je peux seulement dire que ça surprend.
Migraine, LSD : même combat
La phase précédant le déclenchement et les symptômes qui l’accompagnent ont de quoi déboussoler. Le truc sympa, c’est que selon les gens, tout ça se manifeste de manière très différente. Personnellement, j’ai droit aux hallucinations visuelles, plus rarement j’ai en bonus des déformations auditives et –surtout- je ne coupe pas à l’air idiot et hébété. Oh, et j’oubliais. Je m’emmêle les mots. J’en dis un pour un autre. J’inverse les syllabes. Je fais des contre-sens. Bref, je perds 30 points de Q.I d’un coup. Heureusement, ça ne dure qu’une petite demi-heure, avant la douleur en elle-même, mais ça m’a déjà valu pas mal de compliments (« mais elle est bête, la madame, maman ? » « Oh, t’as vu, elle est toute verte » « Wouh, que t’es moche aujourd’hui »).
A défaut d’être rigolo à vivre, ça peut l’être à observer. On se console comme on peut, en tout cas.
La migraine, c’est assez difficile à décrire et plutôt compliqué à définir, parce que la douleur se vit de manière personnelle.
Des symptômes paralysants
Dans mon cas, elle se traduit par la nécessité de me plonger dans le noir, couchée, la tête appuyée sur le coté où siège la douleur. Ce sont aussi des nausées, des bouffées d’angoisse et de colère.
Des nausées, parce que d’après les médecins, quand le cerveau a trop mal, il envoie un signal particulier au corps, et ce signal, c’est : « attention, tu vas vomir ». Ce n’est que mon humble avis, mais je trouve ça plutôt cruel de sa part. Et pas franchement nécessaire.
D’angoisse, parce que parfois, c’est con, mais j’ai si mal que j’ai peur de mourir. Que je pense aux tumeurs, aux AVC et à plein d’autres horreurs. De colère, parce que c’est dur, d’être ainsi rattrapée par une faiblesse qu’on contrôle mal, ou pas du tout. De frustration, parce que cette pétasse de migraine, « Miggie », de son petit nom – parce que oui, t’as vu, j’ai tellement mal que je lui parle, la supplie, l’engueule, selon les moments, et à haute voix, en plus – surgit toujours au mauvais moment.
Soyons clairs, la migraine ne rend pas visite le dimanche après-midi, quand on s’emmerde et qu’on à rien de mieux à faire. De préférence, elle se pointe lors des journées chargées, des anniversaires, des examens, des entretiens d’embauche. En général, ça coïncide juste avec ces instants où prendre un cachet puissant qui la ferait disparaître en une heure n’est tout simplement pas envisageable. Parce que si les traitements calment la migraine, ils assomment le migraineux, par la même occasion.
On n’a rien sans rien, dans la vie, ma fille.
Migraine, mal-aimée et incomprise
Tout ça pour dire qu’avoir une vingtaine d’années et des migraines, ça n’a rien d’amusant. Parce que, comme si c’était un choix ou une religion, certains n’y croient pas. Ca fait le tri dans les amis, ça agace les employeurs et ça contrarie les professeurs. C’est très peu pris au sérieux. Les traitements sont hors de prix et non remboursés par la mutuelle, parce que des connards en blouse blanche ont décrété que ces cachets étaient des médicaments de confort, rien de plus. C’est handicapant, et ça isole un peu, quand on en a très régulièrement.
Il y a plus grave dans la vie. Ca n’a rien d’une maladie dangereuse. Mais il y a plus gai aussi, il y a la vie que je menais avant de devoir réfléchir à tout ce que je mange et bois, à l’heure à laquelle je me couche et me lève, la vie que j’avais quand oublier mes lunettes de soleil un jour d’été n’avait rien d’un drame, et quand la fumée de cigarette ne me donnait pas envie d’enfoncer un paquet entier de cigarettes dans le derrière du premier fumeur qui en allume une devant moi. Il y a plus grave dans la vie, mais avant… C’était franchement plus amusant.
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