Qui aurait pu s’imaginer que le temps se serait si vite écoulé ?
Il y a trois ans se terminait mon CDD chez madmoiZelle en tant que rédactrice à temps plein. Je venais de lancer mon blog pour parler poney.
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Je ne pensais pas que je serai contactée par mon premier client me proposant une mission régulière en indépendante. Je n’ai pas vraiment réfléchi, je n’avais pas peur : tête baissée, je me suis lancé.
Ma mère me le disait toujours quand je traversais la cour du collège à l’heure où elle venait me chercher en Twingo :
« T’es bien une Taureau toi, tu fonces toujours les yeux par terre, comme une boule de bowling. Et les quilles c’est les autres ! ».
Dans ce cas précis, « les autres » allaient bientôt se transformer en « la porte de l’URSSAF de Lorraine ».
J’ai choisi ce mode de vie, être freelance, il y a quelques années. Je peux aujourd’hui te dire que je ne le regrette pas une seule seconde.
Je te parlais des avantages à être ta propre patronne au début de mon expérience, aujourd’hui j’ai assez de recul pour me rendre compte qu’être freelance m’a appris quelques leçons !
Par exemple…
Quand on est freelance, il faut savoir se faire aider
En 2014, quand j’ai quitté les bureaux de madmoiZelle, j’avais déjà quelques clients réguliers et je n’avais pas besoin de démarcher pour trouver du travail. J’ai rapidement fait entrer beaucoup de chiffre d’affaires.
On m’avait conseillé de m’inscrire en tant qu’auto-entreprise, un statut simple et pas trop taxé, pratique quand tu débutes. Dont acte.
Joie et malheur pour moi, ce statut inclut un plafond de revenus à ne pas dépasser. Et dès la première année je l’ai littéralement explosé !
J’ai reçu un courrier qui m’expliquait que j’allais automatiquement basculer au statut supérieur, devoir facturer la TVA et plein de choses qui semblaient super compliquées.
Jusqu’alors, j’avais juste à me connecter sur un site tous les trois mois, déclarer et payer. C’était simple. Plus maintenant.
J’ai appelé le RSI, l’URSSAF, Harmonie Mutuelle, ma mère, le livreur Sushi Shop. À chaque fois mes échanges ressemblaient à ça :
— Bonjour, j’ai reçu une lettre m’annonçant que je devais faire les démarches pour modifier mon statut. — Profession ? — Rédactrice Web. — Numéro de SIRET ?
[Cherche mon numéro de SIRET et le dicte en articulant comme une orthophoniste]
— Ah non non, vous n’êtes pas une profession libérale, absolument pas. Vous êtes artisan. D’ailleurs, vous avez fait votre demande d’ACCRE ? Non ? Ah bah trop tard. Vous avez perdu mille balles. Vous vouliez quoi déjà ? —Euh non, je ne fais pas de la poterie je suis profession libérale ! J’ai dépassé les plafonds, je dois changer de statut je ne sais pas à qui je dois m’adresser. — Ah bah moi j’ai pas accès à ça, désolé. Et vous êtes bien artisan dans nos fichiers. Bonne journée. »
Je commençais à ne plus dormir la nuit. À me réveiller, quand j’y arrivais enfin, avec l’image d’un bonhomme à la porte me demandant l’intégralité de mon PEL pour couvrir le fait que je n’avais pas fait les bonnes démarches assez vite.
Alors mon père a eu la meilleure idée de sa vie (après celle d’accepter de nous amener à la fête foraine de Lignen-Barrois avec mon frère en 2004 parce qu’ils avaient fait venir le Jukebox où tu as la tête en bas)…
Il m’a pris un rendez-vous avec un comptable.
Au départ je me disais que ça allait me coûter un rein, qu’il allait rire à trois centimètres de mon visage et me faire regretter de ne pas avoir continué la SES en Première.
C’était faux.
Mon comptable a été là pour m’expliquer tout ce qui allait se passer pour moi. Il a pris mon dossier en main et s’est occupé de toutes les démarches.
Mon seul boulot, à partir du moment où j’ai choisi de bosser avec son cabinet, a été de remplir un classeur avec mes factures, mes billets de train et le reçu de mon pass Navigo tous les trois mois. Tout le reste, c’était géré.
Un vrai conseil et surtout un soutien qui m’a permis de me concentrer sur mon boulot plutôt que sur la paperasse ! Le tout pour un peu moins de 100€ par mois (dont une partie déductible des impôts).
Au départ, je pensais qu’être freelance c’est devoir TOUT gérer seul•e. Je commençais à me noyer et à voir mon manque de formation sur le sujet comme un échec. J’avais tort !
Bien entendu, il n’est pas obligatoire de prendre un comptable, dans mon statut en tout cas. Certain•e savent très bien gérer l’administratif, surtout tant qu’il n’y en a pas beaucoup.
Au départ, peu de freelance font appel à un comptable, mais c’est tout de même assez répandu. C’est d’ailleurs une blogueuse/youtubeuse assez connue qui m’a conseillé de me rapprocher d’un cabinet d’experts.
Être indépendant•e c’est aussi savoir demander de l’aider et se concentrer sur l’essentiel : RAMENER DE LA THUNE.
Quand on est freelance, il faut savoir arrêter (parfois) de bosser
Je me suis jamais sentie aussi épanouie et fière de moi que depuis que je n’ai plus de patron•ne. Je n’ai jamais, non plus, été aussi angoissée et triste.
On m’avait prévenue, et on va pas se mentir : bosser pour soi, c’est prendre le risque de bosser tout le temps.
Depuis que je travaille de cette manière j’ai pris une seule semaine de vacances quasi-déconnectée. Sinon, je ne passe pas une journée sans écrire un article, un post Facebook, répondre à des mails ou aux appels des clients…
C’est très valorisant, mais très stressant aussi.
Il y a cet avantage, qui pour moi est le plus important de tous : celui de pouvoir s’organiser comme on le souhaite et se dégager beaucoup de temps pour soi dans la journée. Temps qu’il faudra rattraper ensuite.
Personne n’est derrière toi pour te rappeler d’allumer ton ordi à l’heure, certes…
Mais ton client sera toujours là pour laisser 6 messages vocaux exigeant que l’article soit modifié dans la seconde (alors que tu avais prévu d’ENFIN manger) (manger c’est bien).
Quand tu es freelance, tu peux aussi travailler de la manière dont tu le souhaites, où tu le souhaites. Tu ne dois rendre des comptes à personne sur la manière dont tu travailles, seulement sur le résultat.
Et ça, c’est vraiment ce qui me plaît le plus au quotidien.
Dis-moi si mon article te plaît mais ne juge pas mon maintien sur une chaise de bureau.
J’apprends toujours, je me force à faire la part des choses entre mon travail et ma vie perso. En étant freelance, on mélange souvent les deux.
Si tu décides de te lancer, je te conseille de te créer un espace « spécial boulot » (même dans un studio) et d’éviter au maximum de bosser dans ton lit ou sur ton canapé quotidiennement.
Je le fais encore parfois et ce n’est vraiment pas bon. Parce que j’ai du mal à déconnecter. Commence à associer tes draps à tes factures du mois d’octobre, et c’en est fait de ton état mental au moment de poser ta tête sur l’oreiller.
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On a tendance à penser qu’en étant freelance on passe sa vie à se motiver pour bosser. Pour moi c’est plutôt le contraire.
Il FAUT, et c’est TRÈS important, savoir dire stop. Savoir dire non à un client. Savoir relâcher la pression et se dire qu’on pourra le faire plus tard. À la dernière minute si il le faut. Tant pis. C’est pas grave. Rien n’est grave.
Être malheureux•se car on ploie sous la pression, ça, c’est grave. Et c’est tout.
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Quand on est freelance, il faut en faire trop
Le contrepied du point précédent, c’est qu’il ne faut pas non plus oublier que comme tu travailles indépendamment d’une structure, ton patron ne sera pas là pour faire du recadrage.
Pour être claire, si tu ponds un boulot pas top, ou disons un vrai boulot de merde (ça arrive à tous, c’est humain), ton client ne va pas s’emmerder à te dire pourquoi ton travail est nul. Il va tout simplement te payer et ne plus jamais bosser avec toi.
Ni parler de toi en bien.
Être freelance c’est accepter en permanence que ton boulot soit jugé par des gens, disons… plus ou moins compétents. Au final, c’est quand même le client qui a le dernier mot.
Il faut donc bien choisir avec qui on travaille !
Il faut aussi savoir se botter le bouli pour ne jamais se reposer sur ses acquis. Il existe pas mal de formations en partie remboursées, entre autres façons de rester au niveau.
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C’est beaucoup de boulot, mais aussi une super manière de relever des défis sans rester dans une routine qui peut finir par s’essouffler… et les clients avec !
Quand on est freelance, il faut prévoir les mauvais coups
On m’avait dit que j’aurai beaucoup de charges. On m’avait prévenue : il fallait que je mette de côté.
Et je l’ai fait ! J’avais plusieurs comptes d’épargne, toujours une somme conséquente sur mon compte pro, je me payais une somme vraiment faible (comparée à mon chiffre d’affaires).
Et pourtant, aujourd’hui je me prends un rattrapage en pleine tronche. Je dois faire face à des envois de chèques de plusieurs dizaine de milliers d’euros au RSI et à l’URSSAF. De mon épargne sur environ cinq ans, il ne reste plus qu’un gros tiers.
Sans compter le fait que je suis très mal couverte, que je cotise encore plus mal pour ma retraite. Être freelance c’est la liberté, c’est potentiellement brasser beaucoup d’argent… mais en rendre aussi, énormément.
Quand j’attends le facteur apportant mon nouvel avis d’échéance.
Entre ce que tu factures et ce que tu gagnes réellement (sans compter les impôts), je te conseille donc de diviser par deux. Minimum.
Du coup… arrête de justifier tes prix vis-à-vis d’un client radin. Lui ne paie aucune charge en faisant appel à toi, pour le coup !
Un tarif, c’est très difficile à fixer, tout dépend de la charge de travail, du temps potentiel, du client aussi. Il ne faut pas avoir peur de la négociation,
toi seul•e sait ce que tu vaux !
Quand on est freelance, il faut savoir s’entourer
C’est une question classique quand on bosse de façon indépendante.
« Mais tu sors quand même ? Tu vois des gens ? »
Je ne vais pas vous mentir : si je me laissais aller, non, je ne sortirais pas. Pourquoi ? Parce que j’ai l’impression de vivre en décalé.
Quand mon mec rentre du boulot, il a passé douze heures à supporter ses collègues, à faire bonne figure, à éviter les pisses de chiens dans la rue et se battre pour sa place dans le métro. Alors il a envie de se poser.
Moi, je viens de passer tout ce temps dans la même pièce. Je n’ai qu’une envie, c’est de mettre le nez dehors.
Quand on est freelance, il faut entretenir sa vie sociale ! On est rapidement aspiré•e par le travail mais être bien entourée c’est important.
Si tu ne supportes pas de bosser en ermite chez toi, tu peux te rapprocher d’espaces de co-working ou même aller travailler chez des amis ou dans le café du coin. Promis, ça aide de se sentir un peu moins seul•e.
Avoir un chien aussi.
Bosser en freelance, c’est toujours cool ?
Carrément ! Il n’y a pas un jour où je regrette d’avoir choisi de travailler chez moi.
Après 3 ans, j’ai pu me confronter aux revers de la médaille mais je pense que ça me rend meileure. N’est-ce pas la morale de chaque Disney : relève-toi, soldat, il reste encore un combat, et tu vas gagner, oui, pour la liberté ?
Ah non, c’est Dreamworks.
Ces 3 ans en freelance m’ont permis de développer à fond mes projets, de sortir de ma zone de confort tous les jours et d’entreprendre.
Je ne pensais pas pouvoir faire autant de choses. Je ne m’en sentais pas forcément capable en sortant de mes études. Maintenant je sais !
Dans les prochains mois, je vais revenir dans un cadre plus « classique », mais avec un statut d’associée : un poste de cheffe édito dans une rédaction, ma rédaction, sur mon propre magazine ! Tu sais, « mon blog pour parler poney ».
Un partenaire s’est rapproché de moi. Pour lui, le projet méritait de prendre encore plus d’ampleur et on va bosser ensemble pour ça. C’était mon but premier en me lançant : let’s go conquérir le monde !
Eh ouais. C’est devenu plus qu’un blog.
Si je devais terminer ce discours, un verre de Martini à la main, les yeux humides, debout devant 300 personnes, je dirais : merci, vie de freelance. T’étais vachement cool. On reste amis, ok ?
Non mais vraiment, genre sur Facebook et tout. À la limite je te poke sur Linkedin si jamais.
On fait comme ça. Bisou.
Alors, boulot, bouffe, bouquins ou les trois en même temps ?
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Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
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