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Et si... Et si...

J’ai testé pour vous… être fille au pair en Allemagne

Depuis mai 2011, Mazinga est fille au pair en Allemagne, à Stuttgart. Elle vous fait part de son expérience, entre idées reçues, famille compliquée et apprentissage.

Avant de vous expliquer en long, en large et en travers ce qu’est la survie dans le milieu des filles au pair, je me dois de vous confesser quelque chose : je n’ai jamais réellement apprécié les enfants. Je ne vais pas cracher sur mes petits cousins, mais je suis du genre à rejoindre les groupes Facebook « Collectionner les enfants dans son congélateur » ou « Vendre son frère sur ebay pour s’acheter une Xbox« , à râler quand un bébé pleure dans le TGV ou à préférer économiser pour un voyage plutôt que pour un paquet de couches. Mais alors, me direz-vous, pourquoi devenir jeune fille au pair ?

Le fait est que j’ai toujours aimé les défis. Je terminais ma licence, je n’avais pas envie d’attaquer les concours, encore moins un master, ni de me lancer dans la vie active ; je voulais m’expatrier et me retrouver un peu seule. Rapidement consciente qu’il me faudrait gagner quelques pesetas plutôt que de m’exiler dans un temple bouddhiste, le concept de la jeune fille au pair me semblait parfait : une famille d’accueil, des enfants (forcément adorables) et un pays étranger. Un idéal qui s’est très vite cassé les dents sur la dure réalité.

Choisir le site qui décidera de ta destinée

Une fois ma décision prise sur un gros coup de tête, me voilà partie à la conquête des Internets (oui, je fais du slam à mes heures perdues). Je trouve plusieurs agences, plus ou moins bien notées, mais avec un point commun : elles sont payantes. Étant étudiante, autrement dit fauchée 32 jours par mois, je me rabats sur les sites permettant aux familles (en échange d’une adhésion payante) de contacter les « au pair » potentiels. En plus, s’ils paient, c’est bien qu’ils ne sont pas foncièrement diaboliques : ça rassurera ma grand-mère, toujours optimiste, qui estime que ces gens sont des parents assoiffés de sang qui te mettront au pain et à l’eau dans leurs caves.

Je jette mon dévolu sur Au pair world, crée mon profil (je peux sélectionner les pays qui m’intéressent, l’âge des enfants à garder (pas de bébé qui pleure, merci), etc.) et je reçois une foultitude de demandes le soir même, probablement grâce à mes yeux de biche et à mon décolleté vertigineux (personne ici ne connaît mon physique donc je me fais un peu mousser).

Sélectionner LA bonne famille

Comment choisir la famille ? Celle qui sera aussi aimante que les Ingalls, et aussi drôle que les Kyle ? Définissez des critères : le nombre et l’âge des enfants, la ville et le pays où ils habitent (selon l’éloignement que vous vous sentez prête à accepter)… S’ils ont déjà fait appel à une fille au pair, n’hésitez pas à leur demander ses coordonnées pour la contacter. Pour ma part, l’Angleterre étant extrêmement demandée, je me suis vite décidée pour l’Allemagne, histoire de me perfectionner en teuton et de manger des bretzels à longueur de journée.

Après avoir éliminé les familles qui habitaient un peu trop loin des « grandes » villes et celles qui me paraissaient un poil trop strictes pour mon côté tête-en-l’air, il ne me restait plus que deux choix : Berlin ou Stuttgart. Le dilemme qui tue. Tout me poussait vers la capitale, mais j’ai fini par choisir la raison et Stuttgart, une ville plus petite, mais que j’imaginais plus conviviale et agréable à vivre. Un peu pressée par le temps, dans la salle informatique de ma fac, je n’y ai pas réfléchi à deux fois : une rencontre avec la famille fut fixée en mai, et mon futur sentait bon la choucroute, les Spätzle et la chaleur du foyer.

stuttgart-airport

Le débarquement (loin de la Normandie)

Mi-juillet, je débarque après un voyage interminable en TGV bondé, une correspondance presque manquée et deux valises qui pèsent environ trois fois mon poids à traîner. Je me sens forte, je suis motivée, l’excitation me rend complètement enthousiaste, j’ai le coeur ouvert à l’inconnu et l’envie de dire bonjour à n’importe qui. Les premiers jours ne sont pas forcément très faciles, car les garçons (voilà mon vrai défi : m’occuper des trois fils, de 9, 12 et 13 ans) étaient attachés à leur ancienne « au pair ». Ils font donc de leur mieux pour me prouver qu’ils n’ont pas besoin de moi, et le rythme familial, beaucoup moins cool raoul (expression déclarée morte en 1993) que chez moi, n’aide en rien.

Adieu à ton idéal tu diras (et comme Yoda à parler tu commenceras)

Au revoir les idées reçues : mon cliché sur les Allemands et leur coolitude, notamment au niveau de la bouffe, a volé en éclats à mon arrivée dans cette famille 100% diététique qui ne pardonne aucun faux pas. Adieu, plats en sauce, goûters aux Kinder, Coca et brioche beurrée : je débarque au pays des brocolis, du fenouil et des pommes de terre cuites à l’eau, sans sel ni beurre. Pour la carnivore que je suis, l’abandon presque total de la viande (considérée comme « trop grasse » !) est un choc qui ne peut pas être soulagé, même par quelques films de zombies.

Quant à la maison, tout doit être impeccable, et surtout, ne rien abîmer, ne pas casser la vaisselle en porcelaine car « ça coûte cher

« . L’argent, qu’ils ont pourtant en abondance, est le thème qui revient le plus dans la maison. Mon père c’est pas Rotschild, mais si on fait attention aux dépenses chez moi, c’est toujours en essayant de faire plaisir à tout le monde ; ici, j’ai vite compris que les parents peuvent se permettre un canapé en cuir à 10 000€, mais que les enfants peuvent se gratter pour avoir un nouveau livre.

Être jeune fille au pair, c'est un peu marcher sur des œufs (oui, pardon, elle était facile)

Être jeune fille au pair, c'est un peu marcher sur des œufs (oui, pardon, elle était facile)

Petit aparté : je ne veux pas effrayer celles qui comptent partir en Allemagne ! J’ai rencontré beaucoup d’autres familles bien plus détendues et vivantes, qui m’ont prouvé que la « mienne » était une exception.

La famille parlant très bien le français, je n’ai jamais eu de problèmes de compréhension. J’ai pris quelques cours d’allemand, et conseille à toutes celles qui partent à l’étranger d’en faire de même, pour changer un peu d’air et pouvoir se débrouiller dans la vie quotidienne.

Faites des gosses, qu’ils disaient…

J’étais partie sur l’idée que des enfants de cet âge-là seraient assez indépendants, et qu’on pourrait faire des choses ensembles. J’avais tort. Je me suis rapidement aperçue que leur mère les laissait en roue libre, et que si quelque chose n’allait pas, c’était moi la fautive. Je me suis retrouvée à remplacer leur maman, absente la moitié de la semaine, en voyage d’affaires tous les mois, qui a visiblement autre chose à faire que de s’occuper de ses fils. Quant au père, stressé par son travail, il ne souhaite qu’une chose : le calme. Sauf que trois garçons de 9 à 13 ans, ce n’est pas fait pour rester sur une chaise toute la journée.

Voici un autre conseil pour les futures « au pair » dans l’assistance : évitez tout risque de crise d’ado au moment de choisir votre famille, car si vous y êtes confrontées, il faudra recevoir tout le mal-être des enfants en pleine figure sans jamais pouvoir vous défendre. « Celui qui n’a jamais été seul« , chantait l’autre (oui, je suis mélomane) : eh bien moi, seule, je l’étais, contre un gamin de treize ans qui m’adore le matin, et me hait dix minutes plus tard, réclame mon départ et jette des trucs par terre avant de claquer les portes. C’est le moment poker face où tu penses très fort au fait que tu n’as pas mérité de payer pour une communication familiale pourrie.

Pourtant, j’ai survis (copyright John-David, le philosophe de Secret Story 2)

Entre crises familiales et accumulation de tâches ménagères, l’impression d’être Cendrillon est vite arrivée. Mais heureusement, il n’y a pas que des mauvais côtés.

Le pays, tout d’abord : l’Allemagne est le pays parfait pour ceux et celles qui aiment à la fois la ville et le calme. Les fans de sports seront ravis par les chemins de randonnée, pistes cyclables, forêts et autres parcs, tandis que les autres pourront se rabattre sur les musées, les boutiques de DVD à bas prix, les vêtements soldés et Müller, le paradis du chocolat en promotion et des cosmétiques tarif réduit. J’y ai rapidement établi mon Q.G., et les tablettes de Milka et de Ritter Sport à 55 centimes sont devenues mon refuge.

Ouh yeah.

Ouh yeah.

Par ailleurs, même si « ma » famille me donne souvent des envies de double facepalm, j’ai appris à vivre à leurs côtés et je suis toujours consultée pour les sorties au restaurant ou au cinéma. Le père me propose souvent de regarder un film avec lui (ce qui me change de ma télévision pourrie), les enfants sont la plupart du temps vraiment adorables et je suis contente de mettre un peu de bonne humeur dans un foyer qui n’en a pas vraiment l’habitude. Les câlins, les moments de complicité et les jeux (je suis devenue une pro du Monopoly) sont autant de points positifs.

Solide comme un roc (encore mon bon goût musical)

Aujourd’hui, 12 mai 2012, il me reste encore exactement 73 jours à faire ici. Je ne vous cache pas que l’expérience commence à être un peu longue, que par moments, je rêve de me retrouver chez moi, sous ma couette, à me faire l’intégrale du Seigneur des Anneaux avec un thé sans qu’un des garçons viennent me voir toutes les deux minutes.

Pourtant, je n’ai pas envie de ne voir que le mauvais côté de la chose, même si j’ai tendance à râler. Sans compter mon allemand qui est bien meilleur, ma patience s’est aussi largement développée, tout comme mon côté responsable. Faire attention à ce que ces petits monstres ne se blessent pas, leur cuisiner des trucs improbables, gérer les devoirs, sont devenu des choses familières.

Surtout, moi qui ai toujours voulu prouver à quel point j’étais mieux seule, sans attaches, je me suis rendue compte à quel point mes amis et ma famille étaient importants. J’ai aussi pris conscience de l’importance d’une communication saine au sein d’un foyer, car bientôt les garçons seront trop âgés pour avoir besoin d’une fille au pair, et personne ne pourra plus compenser l’absence des parents.

Voilà ma (longue) expérience de fille au pair. Je ne prétends pas vous exposer quelque chose d’universel, il y aura toujours du bon comme du mauvais dans chaque récit similaire. Cependant, je finirai sur une certitude : si c’était à refaire, je n’hésiterais pas, car j’ai beaucoup trop appris pour vouloir revenir en arrière.

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Les Commentaires

30
Avatar de Mazinga
12 avril 2013 à 00h04
Mazinga
Hey Crocuta! Je repasse par ici vite fait, je ne sais pas si tu as eu des réponses entre deux (ou si tu verras ce message d'ailleurs!).

Les jours de congés dépendent toujours de la famille mais normalement, il n'y a aucun problème pour avoir des journées tranquilles! Les week-ends sont généralement libres (sauf si les parents ont besoin de toi) donc tu pourras rentrer en France régulièrement =)

Tu peux toujours en parler aux familles que tu auras sélectionnées, ils sont normalement très compréhensifs sur ce sujet!
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