Avec sa grosse barbe et son gros ventre , mon papa ressemble à Hagrid… en plus chauve. Il aime les westerns, Pierre Desproges, mettre de la musique classique très très fort dans sa chambre, préparer des patates, les bateaux, les romans policiers, rire aux blagues du Canard Enchaîné, regarder C dans l’air à la télé. C’est un homme normal, en somme.
Mon papa a toujours été quelqu’un de drôle, on a tous d’ailleurs été élevés aux contrepèteries et aux blagues des Nuls (ce qui nous a naturellement dotés d’un sens de l’humour assez développé, ainsi que de beaucoup d’auto-dérision). Mon papa est quelqu’un qui ne parle jamais de lui, il n’aime pas fêter son anniversaire et je ne sais pas grand chose de lui avant d’être « papa ».
Jamais il ne nous a clairement parlé de sa maladie. Je ne crois pas l’avoir déjà vu en « bonne santé », ou du moins , je n’en ai que des souvenirs très flous. Dans mes souvenirs, nous sommes tous réunis, mon frère, mes soeurs, ma mère, mon père et moi, dans la cuisine, mon père riant et faisant des blagues du genre « Hé ! Super Cassis !
» (j’ai jamais compris cette « blague » mais ça nous faisait beaucoup rire) ou bien , se tournant vers moi : « Des nouilles, encore !! » (contrepèterie de base avec beaucoup de lulz dedans).
Avant, mon père grossissait et maigrissait à vue d’oeil, multipliant les régimes, devenant boulimique. Et puis, il y a peu de temps, les signes de la maladie sont apparus. Il ne supportait plus le bruit, la foule, il avait du mal à bouger, il se renfermait de plus en plus sur lui-même. Son copain Parkinson ne se manifeste pas de la façon dont tout le monde l’imagine , du genre « Hey je fais de la vinaigrette seulement avec une main ! », non, c’est pas comme ça. Il se manifeste en lui rendant désormais impossible certaines choses qu’il pouvait faire avant. Parkinson s’est installé dans sa tête, l’empêchant peu à peu de bouger, de mettre sa ceinture en voiture, de se lever du canapé, d’avoir une vie sociale normale. Les médicaments l’aident à avoir moins mal, mais, effet comique, ils le rendent somnolent, surtout au moment du repas, ce qui nous donne droit à des « mmmggnnng fromage mghpzhfkfhr pouet héhé mgnghgmeffho ok j’vais m’coucher » accompagné d’un merveilleux regard complètement stone.
Depuis quelques années, mon Papa se réfugie dans le dessin, et l’aquarelle, qui est devenue sa passion. C’est une drogue qui l’aide à ne plus penser à la maladie, sûrement. En dehors de son travail, il ne fait que ça : s’enfermer dans sa chambre et peindre. Cette dépendance est probablement liée à sa maladie mais elle lui permet de se sentir mieux, plus heureux, content de lui.
Mon Paparkinson est vraiment trop cool. Je l’aime comme ça, gros, barbu, rigolo, qu’il pue des pieds ou pas, qu’il soit malade ou pas. C’est mon Papa.
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