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Chronique d’une ex-fumeuse #2 — La prise de confiance

Sophie Riche a arrêté de fumer depuis maintenant presque deux semaines. Elle te parle de cette expérience pas si traumatisante que ça.

Il y a treize jours, j’ai arrêté de fumer. J’ai grillé ma dernière cigarette, je l’ai éteinte et j’ai décidé de ne plus jamais retoucher au tabac et à la nicotine de ma vie.

À lire aussi : Chronique d’une ex-fumeuse #1 — La frénésie des premiers jours

J’ai choisi de faire comme Allen Carr le préconise : sans substitut. C’est-à-dire que, du jour au lendemain, j’ai arrêté d’injecter dans mon organisme la nicotine, cette substance addictive, que ce soit en cigarette, en cigarette électronique, en patch ou en chewing-gum. C’est une méthode qui peut ne pas convenir à tout le monde, mais je crois qu’on peut dire que, jusque là, elle me va bien. Le sevrage se passe plutôt normalement : je n’ai pas eu d’excès de rage, je n’ai pas eu d’excès de mauvaise humeur (pas plus que d’habitude en tout cas) (je suis facilement ronchon, y a quoi ?), je ne me suis pas sentie triste ou dépouillée.

Ça fait bientôt treize jours que je n’ai pas touché à une cigarette, j’ai économisé pour l’instant 84,50€, et tu sais quoi ? Ça va. Ça va vachement bien. Treize jours, c’est pas assez pour retrouver son corps d’avant la clope, mais c’est largement suffisant pour voir les premiers effets : je prends les escaliers plutôt que l’ascenseur et, alors qu’avant, je crachais mes poumons pendant cinq bonnes minutes après deux petits étages, je suis vaguement essoufflée pendant une trentaine de secondes au bout de 4 étages en colimaçon.

 mia Meilleur moyen de foutre le feu à sa frange, alors là, bravo.

On m’a dit « tu vas voir, tu vas grossir ». Bon alors oui, j’avoue : j’ai grignoté en masse du deuxième au neuvième jour. J’avais envie de manger tout le temps, parce que je n’avais plus rien pour me récompenser. Avant, je fumais une clope pour me féliciter d’avoir fait un truc qui m’ennuyait (et aussi quand je m’en voulais de ne pas avoir fait un truc) (puisque je fumais tout le temps).

Un soir, après avoir passé du temps dans un bar, je suis rentrée chez moi à pieds. Sans fumer. C’était la première fois que j’allais boire dans un bar, c’était la première fois que je rentrais un peu pompette depuis que j’avais arrêté de fumer. J’étais trop fière, et j’ai eu envie de me récompenser, mais comment faire puisque j’avais tiré un trait sur ce que je considérais comme ma récompense (mais aussi mon réconfort, mon soutien, mon pilier, et mon habitude, bisous le syndrome de Stockholm) ?

Je suis donc rentrée en pleine nuit dans un snack ouvert. Je savais qu’ils ne prenaient pas la carte bancaire alors j’ai demandé ce que je pouvais avoir pour 3€ et je suis ressortie avec un cheeseburger/frites, alors que je m’étais goinfrée de fromage et de charcuterie une heure avant. Le fait est qu’en le mangeant, j’ai autant culpabilisé que je culpabilisais quand je fumais la cigarette de trop avant d’aller me coucher (celle que j’allumé juste après en avoir éteint une, celle qui pique la gorge et les yeux). Je m’en voulais pas parce que je me faisais plaisir en mangeant un truc gras : je m’en voulais parce que…

  • ça ne me faisait pas plaisir, vu que j’avais pas faim et qu’au même titre que la clope de trop me défonçait la gorge, ce repas m’a vrillé l’estomac
  • j’ai pas décidé d’arrêter un truc nocif comme la clope, que je n’appréciais jamais, pour le remplacer par un autre truc nocif pour moi que je consommerais de façon compulsive.

Du coup, depuis, ça va : ça n’est plus un besoin, parce que mon cerveau est en train de comprendre qu’une clope n’a rien d’une récompense. Fumer une cigarette, c’est fumer un bâton dont je détestais le goût et l’odeur depuis bien longtemps. Pourquoi est-ce qu’il faudrait que je compense par autre chose ?

madmen La zouz elle est tellement accro qu’elle a même un pendentif en forme de clope.

Découvrir la terre du dégoût

Y a un truc un peu zinzin qui s’est produit à peu près une petite semaine après la dernière clope : l’odeur du nuage de fumée de cigarettes des gens qui marchent devant moi en clopant s’est mise à me dégoûter. Avant ça, je ressentais sans le vouloir et sans m’en rendre compte comme une impression de « bon souvenir »… et d’un seul coup, bim, la gerbe.

Je vais pas te mentir : j’ai eu vachement envie, parfois, et j’ai encore vachement envie à certains moments. J’ai envie de fumer quand je vois à la télévision ou sur Internet des gens tirer sur une clope (ça m’est encore arrivé pas plus tard qu’hier soir). Parce que, pour une raison que j’ignore un peu, visuellement, la cigarette me plaît toujours. Je crois que je trouve ça, d’une certaine façon, joli… Jusqu’à ce que je renifle l’odeur du tabac.

Je sais pas si c’est juste l’odeur qui m’écoeure ou tout ce qu’elle implique (le coût, la toux, le simple fait d’être dépendante à quelque chose…), mais ça me passe clairement l’envie de refoutre le pif là-dedans. Ça marche tellement bien, d’avoir ce dégoût dans le nez, que j’envisage de commercialiser des bougies senteur tabac pour les récemment sevré-e-s.

La représentation de la cigarette et le réflexe de la récompense mettent à mal mon sevrage, c’est vrai. Mais pas seulement.

Le pire, c’est quand je dis à certains fumeurs que j’ai arrêté : il y en a qui réagissent trop bien, à base d’encouragements et de joie. Les fumeurs et fumeuses de mon entourage sont comme ça, j’ai vachement de chance. Et puis il y en a d’autres : ceux et celles qui ont peut-être déjà essayé d’arrêter et qui ont galéré, pour des raisons que j’ignore (peut-être qu’ils n’étaient pas prêts, peut-être qu’ils n’en avaient pas vraiment envie). Ça ne part jamais d’une mauvaise intention, vraiment, j’en ai conscience, mais eux ont tendance à dire des trucs comme…

  • « Bah bon courage, tu vas en chier »
  • « Tu vas en chier »
  • « Hahahahah tu y arriveras jamais, tu fumes beaucoup trop »
  • « Il paraît que quand tu arrêtes tu peux prendre jusqu’à 30kg, c’est hormonal »
  • « Tu vas perdre tous tes potes tellement tu vas être relou »
  • « Il paraît que les anciens fumeurs galèrent toute leur vie. Ils arrêtent JAMAIS d’avoir envie, JAMAIS. »

En un mot comme en cent, ils me décourageaient ! Mais ils ont tort : c’est pas insurmontable. Moi, j’ai eu besoin de lire le livre d’Allen Carr pour arrêter et trouver la force de ne pas les croire, certains n’auront besoin de rien d’autre que de leur cerveau, d’autres préfèreront un substitut… Mais je suis sûre à présent qu’il est possible d’arrêter.

Alors oui, il existe des obstacles à l’arrêt de la clope. Pour les contrer, tout est une question d’optimisme, d’auto-persuasion et de choix de mots : j’ai décidé d’arrêter de fumer. J’ai arrêté de fumer. Je n’arrête pas de fumer. Je ne suis pas en train d’arrêter de fumer. Je n’essaie pas d’arrêter de fumer. Je le fais, parce que j’en ai envie, et puis c’est tout. Quand je flanche, je respire très fort, et je me répète ça en boucle.

De nouvelles habitudes

Pour me motiver, et pour encourager à fond cette redécouverte dingue qu’est celle de la machine du corps et des poumons en meilleur état, je me suis inscrite dans une salle de sport : déjà, l’abonnement mensuel équivaut à même pas quatre paquets de cigarettes (donc quatre jours pour moi), et en plus, ça me permet de constater chaque fois que j’y fais à quel point j’avais étouffé mes muscles et engorgé mes poumons. J’en chie, du genre à avoir des courbatures pendant trois jours après dix abdos même pas réussis… mais j’en chierai chaque fois un peu moins.

Ça fait partie de mes nouvelles habitudes pour penser à autre chose qu’à la cigarette, mais en vrai, je n’y pense déjà presque plus. Mon cerveau a très vite cessé de me troller en me faisant chercher, par réflexe, mon paquet de clopes et un briquet quand je rentre chez moi.

lindsay Kestuvafer, cerveau ?

Je pensais que ce serait vachement difficile de ne pas fumer, dans les moments durs. Je pensais que j’aurais forcément envie d’en griller une quand je serai triste, quand je serai de mauvaise humeur… ben que dalle. Il y a quelques heures, j’ai eu un gros pic de bouderie (ça m’arrive, parfois). Il y a quelques semaines, ça m’était arrivé et, je me souviens, je me disais que ça allait être vachement pire quand j’aurais arrêté la clope, comme si fumer me soulageait. Laisse-moi te dire que pas du tout : j’étais de mauvaise humeur, tout pareil, sauf qu’avec une cigarette dans la bouche. 

J’avais également peur que mon rituel, quand je suis seule chez moi la nuit, d’écouter de la musique en fumant sur mon balcon soit moins agréable. En réalité, c’est le fait d’écouter de la musique que j’aime qui rend ce moment cool. Ça n’a rien à voir avec la cigarette, qui détournait mon attention de la chanson que j’étais en train de kiffouiller.

En gros, comme le répète Allen Carr à longueur de bouquin, on s’angoisse on s’angoisse, mais on a rien à perdre en abandonnant la clope quand on est prêt à le faire. Une chose est sûre : si moi je peux arrêter, tout le monde peut. Pas parce que j’étais particulièrement accro (je croyais l’être, plus que tout le monde, mais j’ai compris que tous les gros fumeurs pensent l’être), mais parce que tout le monde peut et puis c’est tout.

Bien sûr, j’en ai pas encore fini, hein : il paraît qu’il faut environ trois semaines pour être sevré-e de la nicotine. Mais, petit un, j’en suis à plus de la moitié et petit deux, j’ai même pas à faire semblant pour être optimiste.

Et tu sais quoi ? Si tu fumes et que tu as envie d’arrêter, alors tu peux le faire. Il faudra trouver ta technique, il faudra que tu te laisses le temps, mais tu peux.

À lire aussi : Chronique d’une ex-fumeuse #1 — La frénésie des premiers jours


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Les Commentaires

12
Avatar de Sophie Riche
5 mars 2015 à 15h03
Sophie Riche
Coucou les fabuleuses Madz !
Je viens un peu raconter ma life, mais j'en ai envie donc allons y :

Après avoir lu l'article (les deux), je me suis dit "quand même ma fille, ce serait bien que tu arrêtes, c'est un peu useless ce que tu t'infliges la !". Du coup je passe à la fnac , le bouquin d'Allen Car était posé en tête de gondole façon graal ^^
Je l'ai lu d'une traite (ce n'est vraiment pas long et pourtant je lis pas vite, il m'a fallu 4h00).
J'ai juste été un peu interpellé par certains propos du bouquin, ou Allen Car voit vraiment les fumeurs comme des gens pitoyables. Ca m'a un peu froissée (oui je suis sensible) parce que j'ai plein d'amis fumeurs et ça me ferait chier d'avoir pitié d'eux. Après c'est rien de bien grave, chacun sa façon de voir le truc Je trouverais le mien
Le bouquin est un poil répétitif, mais il tiens des bons arguments l'garçon, donc faut pas lâcher la lecture !

Du coup merci beaucoup à @Sophie Riche pour le déclic (et les chouettes articles), je me suis fixé une date butoir (j'ai un contrat de travail qui se termine le 16 et je ne me voyais pas arrêter avant).
Donc le 17 mars je serais une femme liiiiiiiiibre, plus de dépenses (mon dieu j'ai fait le calcul et j'ai pris peur, j'aurais pu m'acheter des sacs chez Chanel tous les ans avec ce que je dépense en cigarettes o_O), plus d'appart qui pue, de cheveux qui puent, de fringues qui puent ... de trucs qui puent quoi !

J'espère juste que ça ne sera pas trop dur, mais j'suis plutôt sereine. Et je me dis que si je suis en galère (façon toxico) je pourrais toujours venir clamer ma détresse sur le forum ?!

En tout cas j'y crois à mort ! C'est déjà un bon début

Love kissous, et moultes remerciements <3
COUCOU !
Déjà bravo bravo pour ta prise de décision, c'est selon moi le plus difficile à faire ! Tu verras que vers la fin, t'auras vraiment hâte d'être le 17 et tout.

En tout cas, annonce pour toi et pour toutes : @Miquette a créé un post pour toutes les filles qui arrêtent de fumer, ont envie d'arrêter ou ont arrêté, histoire qu'on puisse s'y encourager et s'y conseiller et s'y plaindre et tout ce qu'on veut ! ÇA VA ÊTRE TROP BIEN !

J'arrête de fumer : le topic

Et oubliez pas : vous êtes les meilleures ! o// <3
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