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Que penser de la levée du secret médical en cas de violences conjugales ?

Le Parlement vient d’adopter une loi qui peut permettre, sans obligation légale, le médecin à lever le secret médical d’une patiente si sa vie est menacée après des violences conjugales. Mais est-ce vraiment une bonne idée ?

Le texte de loi, qui autorise le médecin ou tout autre professionnel de santé à agir en conscience en dérogeant au secret médical s’il estime que la victime est en danger vital immédiat ou sous emprise, a été adopté par le Parlement le 21 juillet 2020.

La proposition de loi qui avait déjà été adoptée par l’Assemblée Nationale, vise à lever exceptionnellement le secret médical en cas de danger immédiat concernant les femmes victimes de violences conjugales.

Dès à présent, un professionnel de santé pourra, s’il estime que le danger est fort, signaler sa patiente à un procureur dédié aux violences conjugales. Ce signalement s’accompagnera de mesures d’accompagnement pour les victimes, sans qu’elles ne soient précisées pour le moment.

Mais est-ce une bonne nouvelle ? L’intention est bonne, presque louable. Le but de cette loi étant d’aider les femmes battues par leur compagnon ou ex-compagnon, ce n’est pas réellement une mauvaise chose. Mais pourtant, c’est aussi problématique, pour de multiples raisons.

Secret médical levé, et l’exposition forcée des victimes

Nous sommes face ici au non-respect du consentement des femmes victimes de violences, qui, pour des raisons n’appartenant qu’à elles, ne peuvent porter plainte contre leur conjoint ou ex-conjoint violent, et ne sont pas, de base, accompagnées dans cette démarche.

Leur forcer la main est-il une solution ? Les conséquences du levé du secret médical pourrait-elles être dramatiques dans certains cas ? Le sujet porte à débat.

Que se passera-t-il pour les femmes dépendantes financièrement de leur conjoint ? Et pour celles qui ont peur de perdre leurs enfants ? Cette mesure ne va-t-elle pas plutôt éloigner les femmes battues des centres de soins, de peur d’être « balancées » par leur médecin ?

Emmanuelle Piet, médecin, présidente du Collectif féministe contre le viol et membre du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, a déclaré au Monde : 

Ce qui pèche le plus, c’est la prise en compte des plaintes et de la parole des victimes. Alors avant de révéler des violences pour des femmes qui ne le veulent pas, commençons par protéger celles qui les signalent volontairement !

Mais tous les médecins ne partagent pas cet avis. En effet, Liliane Daligand, docteure en médecine et en droit et présidente de l’association VIFF-SOS Femmes, affirme qu’elle s’était déjà appuyée sur la dérogation au secret médical pour les personnes vulnérables, qui existe déjà. Elle a déclaré également au Monde :

Ces femmes étaient très reconnaissantes, parce que je les avais sorties d’une situation inextricable, où elles étaient isolées, sous emprise, et persuadées que personne ne viendrait les aider. Cela les avait aussi soulagées de toute culpabilité vis-à-vis de leur mari, puisque ce ne sont pas elles qui avaient porté plainte.

N’y a-t-il pas d’autres solutions ?

Au lieu de lever le secret médical sans consentement, le gouvernement ne pourrait-il pas accompagner réellement les victimes de violences conjugales, en augmentant le budget des structures déjà existantes, structures qui permettent à ces femmes d’avoir la force de partir d’elles-mêmes sans pression judiciaires et médicales ?

Comme le dit l’activiste afro-féminisite Fania Noel sur son compte Instagram, l’État pourrait plutôt transformer une partie des logements vacants en centres d’hébergements d’urgence, ou permettre d’avoir accès plus facilement à des consultations psychologiques gratuites ainsi qu’ augmenter le financement du Planning familial.

N’y a -t-il pas d’autres solutions, à créer ou déjà existantes, qui devraient voir leur subventions augmenter considérablement, plutôt que d’enlever encore le pouvoir aux femmes victimes de violences de prendre des décisions quand elles sont prêtes et quand elles le veulent ?

Il serait temps d’arrêter d’infantiliser les femmes, et de penser aux conséquences que ce genre de loi peut avoir sur la vie de celles qui sont dans des situations dramatiques, et qu’un tel texte pourrait mettre encore plus en danger.

Il faudrait arrêter de penser à la place des victimes et leur forcer la main, au lieu de les accompagner dans leur démarche et les aider à se défendre, en leur donnant les armes pour le faire, ainsi qu’en les aidant concrètement à se reconstruire.

Violences conjugales : les ressources

Si vous ou quelqu’un que vous connaissez est victime de violences conjugales, ou si vous voulez tout simplement vous informer davantage sur le sujet :


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