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Jeff Koons au Centre Pompidou, la déferlante de l’American way of life

Mona est allée voir l’exposition Jeff Koons au Centre Pompidou. Elle vous livre son avis sur cet événement qui fait quelque peu polémique.

Il est assez difficile d’écrire une critique sur Jeff Koons car l’artiste et ses joujoux semblent, presque par essence, intouchables. Monument du néo-pop, jouant avec les codes du kitsch, Koons est l’artiste vivant le plus cher au monde.

Dans la lignée d’Andy Warhol, il se plaît à détourner les objets de la vie ordinaire afin de représenter la société de consommation. Après avoir envahi le château de Versailles en 2008, provoquant l’une des plus grosses polémiques artistiques de ces dernières années, il s’attaque maintenant au Centre Pompidou, temple de tous les adeptes d’art moderne et contemporain !

À lire aussi : Jeff Koons au château de Versailles

Un personnage controversé

Visiter l’exposition Jeff Koons au Centre Pompidou, c’est être préparé à l’entrée fracassante, à grands pas lourds et assurés, de l’« American way of life ».

« Si la France a le blues, je suis désolé de l’entendre. Ce serait merveilleux que cela change. La meilleure chose à faire, c’est d’éprouver la joie d’être, de savoir ce que nous signifions pour nous-mêmes et pour les autres. »

Cette citation de l’artiste montre assez bien la tension constante qui entoure la réception de son œuvre et de cette exposition en particulier. Nombre des publications de la presse française défendent une France critique et alerte plutôt qu’un sentiment du bonheur à tout prix proche de la visite à Disneyland.

Il est assez difficile d’accorder un jugement esthétique aux œuvres. Certes un peu de fantaisie et de références enfantines nous donnent le sourire, mais y voir autre chose reste un sacré défi pour le visiteur.

jeff koons

Un jeu sur la matière, le reflet et la couleur caractérise la majorité de ses productions. Mais une fois cette contemplation passée, les œuvres répondant toutes au même univers, on s’ennuie un peu… Aucune émotion particulière ne se dégage durant la visite, sauf peut-être pour les âmes extrêmes qui apprécient sa série Made in heaven avec la sulfureuse Cicciolina.

En revanche il y a de quoi s’inquiéter, oui, car si c’est ça la référence de l’art contemporain, si le marché de l’art cherche des disciples de Jeff Koons dans chaque foire, alors autant dire que l’on peut renoncer… L’uniformisation culturelle américaine, c’est bien la peur qui plane au-dessus de cette exposition. Vous pourrez me dire que cela n’a rien de nouveau, et en effet il serait absurde de blâmer le Centre Pompidou qui pouvait difficilement refuser d’exposer la star.

« Jeff Koons est un entrepreneur plus qu’un artiste » : c’est sûrement la critique la plus commune. Bien que le rapprochement de ces deux mondes n’ait rien de nouveau, l’Américain est très provocateur quant au business généré par ses œuvres. Son fameux Balloon Dog a été acheté 58 millions de dollars lors d’une vente Christie’s ! Mais il n’a pas hésité à mettre en ventes d’autres exemplaires sur Ebay ni même à collaborer avec la marque H&M, mécène de l’exposition, pour la fabrication de sacs à main. Il semblerait que le marché de l’art explose toutes ses limites dès que monsieur Koons pointe son nez.

À lire aussi : L’artiste Jeff Koons crée un sac à main pour H&M !

Critiquer la société américaine depuis l’intérieur, en questionnant l’idée même de valeur artistique, le tout en jouant sur les codes du marché de l’art, sur le rapport controversé artisan/artiste… voilà un propos qui est loin d’être idiot.

Alors serait-il possible de passer outre la cote délirante de Jeff Koons, qui continue à monter en flèche, nourrissant un marché de l’art toujours plus élitiste et sa personnalité de Messie qui a tout compris et réfute chaque critique blessant son ego surdimensionné ? Telle est la question.

Les prix exorbitants de ses oeuvres et son personnage de businessman empli d’assurance rendent difficile toute objectivité au sujet de l’exposition elle-même. Sorties de ce contexte, les œuvres sont ce qu’elles sont — pas plus mauvaises que beaucoup d’autres, au caractère osé et léger à la fois qui divertit un instant.

Il est tout de même fascinant de voir à quel point la scénographie et le parti pris du commissaire influent sur la vision d’une exposition dont on connaît pourtant déjà le contenu.

jeff koons

À lire aussi : L’artiste Jeff Koons accusé de plagiat par Naf Naf

Une exposition bien pensée malgré tout

Le premier grand espace de l’exposition, qui se présente de la façon chronologique propre à toute rétrospective, nous livre les débuts de la carrière de Jeff Koons : on observe directement l’influence du pop-art tirant vers le kitsch. Ces premières séries représentant des appareils électroménagers et des affiches publicitaires nous rappellent une forme de satire des États-Unis dans les pas d’Andy Warhol.

Ce fut un vrai soulagement, il faut l’avouer, de constater que le commissaire d’exposition, Bernard Blistène, ne nous a pas étouffé•e•s en ajoutant une scénographie lourde à un contenu suffisamment imposant et tape-à-l’oeil. Car on aurait pu imaginer une présentation exacerbant ce côté loufoque et se croire en pleine scène de Charlie et la Chocolaterie ! Au contraire, les différents espaces sont aérés et le parcours n’est pas trop déterminé bien que chronologique, évitant ainsi l’effet Disneystore anticipé par les détracteurs de Koons.

La dernière production, qui clôture l’exposition, est de loin la plus audacieuse, tout en préservant un minimum de bon goût et de sens. Les deux Gazing Ball détournent notre regard sur des statues grecques vues et revues en plaçant un petit ballon bleu vif à un endroit incongru de la sculpture.

Il est agréable de voir Koons s’attaquer à un modèle autre que des objets-joujoux provenant de la société américaine et ses références. Une autre œuvre qui dénote dans ce lot burlesque est la Liberty Bell : c’est presque avec soulagement qu’on l’aperçoit dans un coin, où elle semble petite et maladroite malgré le fait que ce soit une grande et lourde cloche.

À lire aussi : Niki de Saint Phalle au Grand Palais : vie et œuvres d’une sacrée nana

En conclusion, je dirai que rien ne sert de boycotter cette rétrospective : bien au contraire, courez-y ! Mais tâchez de garder l’oeil ouvert et l’esprit critique en alerte. À mon sens il serait dommage de tout rejeter en bloc alors qu’il est passionnant de s’attarder sur les enjeux réels d’une telle exposition.

Pour aller plus loin :


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Les Commentaires

3
Avatar de Freyga
5 mars 2015 à 13h03
Freyga
Merci pour cet article.
J'ai vue l'expo il y a quelques semaines par pur masochisme (et surtout parce que l'on m'a invité) étant donné que je n'apprécie pas du tout Jeff Koons. Je n'ai jamais trouvé dans son travail quoi que ce soit d’intéressant ou de réellement novateur. Je lui reproche d’être complétement aseptisé et de céder à la facilité. Il ne s'interroge pas sur la société de consommation, ne la critique pas (à l'inverse du pop art), ne la désacralise pas c'est même plutôt l'inverse. Pour moi il n'est qu'une représentation de plus de notre société de surconsommation d'ultra libéralisme et de surmédiatisation. Donc l'expo m'a laisser complétement indifférente, impossible de ressentir quoi que ce soit.
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Voir les 3 commentaires

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