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La contraception hormonale m’a causé des dépressions — Témoignage

Cette madmoiZelle ne supporte pas la contraception hormonale… mais il lui a fallu plusieurs épisodes de déprime et de dépression pour que ce soit diagnostiqué. Elle a aujourd’hui décidé de témoigner pour que cet effet secondaire dévastateur ne reste pas ignoré.

Tout commence un peu avant mes 18 ans, en automne 2011. J’ai alors un copain depuis plusieurs mois, ça fonctionne bien, j’ai envie de passer à l’acte et je me tourne donc vers ma gynécologue pour choisir un moyen de contraception.

Étant bien renseignée, j’opte pour l’anneau afin d’éviter les inconvénients de la prise quotidienne et surtout les oublis. Ma première fois se passe comme sur des roulettes, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

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Et pourtant, très vite, mon moral baisse. J’ai moins de motivation, je m’énerve, je me vexe, les larmes montent plus facilement que d’habitude. Étant d’un naturel enthousiaste et optimiste, le changement se ressent tout de suite, autant pour moi que pour mon entourage. Mais ce qui m’intrigue le plus, c’est de ne pas savoir d’où ça vient.

L’anneau contraceptif et la déprime

Je tente de mettre mon humeur sur le compte de l’hiver qui s’installe, même si je n’ai jamais été sujette à la dépression saisonnière, et sur le stress occasionné par l’approche du bac.

Le problème, c’est que ça empire et que ça se répercute sur mes proches : je deviens irritable avec mes parents, et dès que je suis confortablement installée dans mon lit le soir, avec mon copain, je commence à pleurer sans pouvoir m’arrêter et sans savoir pourquoi.

Après deux ou trois mois, ma mère a l’idée de jeter un œil aux effets secondaires de mon anneau contraceptif : on a bien des symptômes comme la dépression ou les crises de stress. Première nouvelle ! J’ai un peu de peine du fait que personne ne m’a avertie à l’avance d’un tel risque et je prends rendez-vous chez ma gynéco.

Elle me rassure immédiatement : elle n’a aucun doute sur la provenance de mon état de déprime et m’explique que je fais peut-être une mauvaise réaction au matériau utilisé pour fabriquer l’anneau. On décide alors de tenter une pilule standard à la place, et elle m’avertit qu’il faudrait idéalement que je la prenne pendant trois mois avant de me faire une opinion, parce que si les symptômes reviennent trop vite, ça peut encore être dû à l’anneau.

Pilule et dépression

Je passe ainsi le pire printemps de ma vie. Ce qui se manifestait comme une déprime se transforme en vraie dépression avec la prise de la pilule : je suis toujours en larmes, sur la défensive, je retrouve de vieilles angoisses que j’avais réglées depuis une dizaine d’années.

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Par-dessus le marché, ma libido est au point mort. Et forcément, tout ce cocktail explosif se répercute sur mon couple. Mon copain peine à comprendre ma situation (comment lui en vouloir, c’est tellement difficile à expliquer sur le moment) et commence à croire qu’il ne me plaît plus, ce qui aggrave la situation parce que je me sens coupable de ce que je lui fais subir.

À lire aussi : La culpabilité sexuelle – Le dessin de Cy.

Cela crée une grosse ambiance donc, surtout que je me prends une énorme claque en réalisant ce qu’un tout petit médicament peut changer dans ma personnalité profonde.

Quand je ressens de l’énervement, je n’arrive plus à dire si c’est légitime et vient vraiment de moi, ou si c’est la pilule qui parle et qu’il faut l’étouffer. Parfois j’arrive dans la cour de mon école et je sens les larmes monter, sans raison particulière, et je suis obligée de lutter de toutes mes forces pour les contenir avant de rejoindre ma classe.

Quand les gens me questionnent sur cette période, j’ai toujours le même exemple qui me revient en tête : cette journée où ça n’allait pas et où j’ai dû renoncer à aller voir le ballet du Lac des Cygnes qui passait exceptionnellement dans ma ville et que je rêvais de voir depuis toujours, simplement parce que je savais que le cygne allait mourir à la fin et que j’en pleurerais toute la nuit.

Le lien entre pilule et dépression était au cœur de l’actualité il y a quelques semaines : une étude danoise ayant conclu que la pilule ainsi que l’ensemble des contraceptions hormonales augmenteraient le risque de développer une dépression.

En 2005, le docteur Martin Winckler expliquait sur son blog que cet effet est plausible :

« La sensibilité aux médicaments est variable d’une personne à une autre et certains ont des effets sur les centres des émotions dans le cerveau. C’est le cas des hormones sexuelles (les femmes enceintes disent que leurs émotions sont bouleversées, ça n’est pas psychologique, mais biologique). […]

Pour endormir l’ovulation, il faut que les hormones des méthodes contraceptives agissent sur l’hypophyse (une glande du cerveau). Or, impossible qu’elles agissent sur l’hypophyse sans agir sur les autres centres — et en particulier ceux qui contrôlent l’humeur. »

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L’arrêt de la pilule : la renaissance

J’arrive au bout de ces trois mois vidée, menant la vie la plus routinière possible puisque chaque imprévu risque de me faire perdre les pédales, et avec un couple qui bat de l’aile mais dans lequel je n’arrive pas à investir de l’énergie. Je prends alors la décision de faire une pause.

L’idée d’arrêter complètement la contraception hormonale m’est encore inconcevable, mais je dois m’assurer que mon état vient bien de là parce que je continue à en douter (et surtout parce que j’ai peur que l’arrêt de la pilule ne change rien). J’espère aussi pouvoir passer mon bac sans pleurer devant les examinateurs — oui, on en est là. Ma gynéco m’encourage dans cette voie et mon copain ne s’oppose pas à cette décision.

Le changement est immédiat. En quelques jours à peine, je retrouve toute mon énergie et je fais face à un ascenseur émotionnel inverse. Je revis véritablement, je revois mes amis, je passe mon bac haut la main et je me remets en question sur beaucoup de points.

Je décide déjà d’entamer une thérapie, en me disant que les angoisses et les crises de larmes sont sans aucun doute provoquées par les hormones, mais n’apparaissent pas forcément de nulle part, et que c’est peut-être la bonne occasion pour régler quelques pans de ma vie.

À lire aussi : REPLAY — « Pourquoi j’ai été voir un psy ? », racontent Mymy, Maxime Musqua & Clara Kane

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Et je prends également conscience de tout ce qui ne fonctionne pas dans mon couple, mais que j’étais trop mal pour réaliser ou rectifier jusque-là. Après de longues discussions infructueuses avec mon copain, je décide finalement de rompre.

Les œstrogènes et leurs effets

Je rentre à l’université et commence à fréquenter un autre garçon. La question de la contraception revient alors sur le tapis et je retourne chez ma gynécologue, qui a deux solutions.

Selon elle, mon problème vient des oestrogènes : j’ai donc le choix entre une pilule sans œstrogène (la Cérazette) à prendre en continu, ce qui peut amener d’autres problèmes comme des pertes de sang tout au long du mois, de l’acné, de la prise de poids et compagnie, ou une pilule « proche de la nature », censée imiter la fluctuation des œstrogènes dans le corps (il faut prendre les pilules dans un ordre précis, et la pause dure 4 jours au lieu d’une semaine).

J’opte pour cette dernière option, histoire de pouvoir me dire que j’aurais tout essayé.

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Comment fonctionnent les pilules contraceptives ? Allo docteurs rappelle que :

« La grande majorité des contraceptifs oraux sont des contraceptifs combinés contenant à la fois un œstrogène et un progestatif, qui sont des dérivés synthétiques de l’œstradiol et de la progestérone, deux hormones sécrétées par les ovaires et impliquées dans le contrôle du cycle menstruel.

C’est le progestatif qui est contraceptif, l’œstrogène étant seulement là pour rendre la prise plus confortable. »

C’est un fiasco, mais ma longue pause m’a appris à détecter les effets négatifs beaucoup plus tôt et je n’attends pas trois mois avant de l’interrompre. Dès les premières bouffées de stress et autres crises de larmes, je stoppe le traitement et me rabats sur la Cérazette, qui est supposée ne rien me faire puisqu’elle contient uniquement de la progestérone.

Et là, ça fonctionne. Je suis très à l’écoute de mon corps les premiers mois, mais je ne sens aucun changement. Et en bonus, je n’ai plus mes règles.

C’est un gros soulagement après tant de galères, et je la prends pendant encore une année. Durant ce laps de temps, mon histoire devient plus sérieuse, je mène ma vie tranquillement, je tombe à nouveau dans une routine mais qui ne me pose aucun problème. Je me dis que je suis en train de me poser, que c’est l’âge probablement.

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Mais l’histoire ne s’arrête malheureusement pas là. Au bout d’une année, une année et demie, je recommence à sentir une baisse d’énergie, de l’irritabilité et tous mes vieux démons qui m’avaient laissée tranquille jusque-là. Je suis dans le déni quelques mois, j’ai trop peur de me retrouver à court de solutions, mais je finis par craquer et je réalise que j’ai encore plus peur de retomber dans ma période noire.

J’arrête la pilule du jour au lendemain, simplement parce que je ne peux plus l’avaler : j’ai l’impression de m’empoisonner et je n’en peux plus.

Se redécouvrir

L’ouragan émotionnel qui s’empare alors de moi est sans précédent, bien plus violent que le premier puisque cette fois j’ai pris la pilule beaucoup plus longtemps.

J’ai de nouvelles envies, en vrac, qui ne m’avaient jamais effleuré l’esprit : partir de chez mes parents, me trouver un appart, aller étudier dans une nouvelle ville, avoir des coups d’un soir, sortir faire la fête… Je suis complètement perdue et je ne sais pas quoi faire de toutes ces nouvelles informations.

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Alors je me tourne vers mon psy, qui m’annonce avec surprise :

« Ça fait plus d’un an que je te connais et je n’ai jamais vu ça, mais je crois que cette pilule t’a complètement éteinte. Tu avais un voile sur les yeux, qui te rendait presque apathique, mais tu ne t’en rendais pas compte. Et maintenant, le voile s’est enlevé d’un coup et tu retrouves ta personnalité et tes envies. Et forcément ça fait beaucoup à encaisser d’un coup. »

Et c’est à ce moment précis que j’ai su que je ne toucherai plus à la contraception hormonale. Je savais que j’avais été influencée, mais de prendre conscience de l’ampleur du changement me terrorise. Parce que, contrairement à tous les gros symptômes que j’arrivais finalement à identifier, là je n’ai rien vu venir, je ne me suis même pas posée de questions. Et je refuse de revivre ça.

Pour une contraception adaptée et une vraie information

Aujourd’hui ça fait plus de deux ans que j’ai tout arrêté et que je me contente du préservatif, et je n’ai jamais regretté cette décision. J’ai mis fin à ma relation de l’époque parce que j’ai vécu un chamboulement tellement fort que j’avais besoin d’être seule pour digérer tout ça et me retrouver. Et petit à petit, je me suis stabilisée et j’ai retrouvé ma personnalité profonde. Je vais extrêmement bien.

Si je reparle de ça aujourd’hui, c’est parce que j’ai connu trop de filles qui avaient le même problème sans savoir d’où il venait et qui prenaient des antidépresseurs ; des filles qui se faisaient larguer par leur copain ou copine parce qu’elles « se plaignaient tout le temps », et qui ont changé du tout au tout en arrêtant les hormones ou en trouvant une pilule qui leur convenait mieux.

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Et pour être passée par là, je ne souhaite ça à personne et j’aimerais vraiment que désormais les gynécologues avertissent directement les jeunes filles au moment de leur prescrire une contraception, pour leur éviter beaucoup de stress, de doutes et d’angoisses.

Guillaume Fond, chercheur à l’Inserm qui travaille sur les liens entre immuno-inflammation, hormones et maladies mentales, a expliqué à L’Express que « cette étude doit interpeller les généralistes qui prescrivent des contraceptions hormonales, tout comme les psychiatres amenés à traiter des dépressions. »

Pour lui, il est évident que « le risque de déclarer une dépression doit être mentionné comme un potentiel effet secondaire de la pilule », même s’il est à relativiser étant donné que « la majorité des femmes qui prennent la pilule ne sombrent pas dans la dépression parce qu’elles la prennent ».


Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.

Les Commentaires

41
Avatar de guerredesmiroirs
10 avril 2019 à 23h04
guerredesmiroirs
A celles qui ont arete la pilule, ca vous a pris combien de temps pour sentir un changement ? Pour ma part, j ai arete depuis un mois et demi, juste pour voir si la pilule avait '' gueri'' mes douleurs mentruelles affreuses. La reponse etant 'toujours un peu mal mais ca va' , je me demande si je vais areter completement, pour voir si ca joue sur ma mini depression (depuis 2 ans, quand meme. Sachant que jai commence la pilule y a 3 ans) .
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