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Vie quotidienne

Je me suis haïe, je me suis mutilée, je me suis affamée… et je vais mieux

L’amour de soi après de nombreuses années d’auto-mutilation, c’est la belle leçon du Corps à cœur, Cœur à corps de cette semaine.

Publié le 14 octobre 2018

Coucou toi !

Cette semaine Chloé prend la parole pour partager son histoire. Celle d’une jeune femme qui a détesté son corps à tel point qu’elle s’est mutilée

C’est quoi, Corps à cœur, cœur à corps ?

Si tu n’as pas suivi, il s’agit d’une série de témoignages illustrés, mettant en avant des personnes qui ont décidé d’avoir un regard plus positif vis-à-vis de leurs complexes physiques.

Il ne s’agit pas de se sentir bien À TOUT PRIX (ça suffit les injonctions, oh !) ou de dire qu’il y a des complexes plus importants que d’autres, mais d’observer les chemins que prennent différentes personnes pour se sentir plus en paix avec elles-mêmes.

Tous les corps sont différents, ça te dit de les célébrer avec moi chaque semaine ?

Les illustrations sont faites par mes petites mains et à partir de photos envoyées en même temps que le texte. J’en reçois plusieurs et je choisis celle qui m’inspire le plus.

Donc, sans plus attendre, le témoignage de cette semaine.

Mon corps, je ne veux plus te blesser

« Le premier jour du reste de ma vie. »

Voici la phrase que je me suis répétée pendant presque un an.

Pourquoi ? 
J’ai attendu sans relâche ce jour où j’assumerai qui je suis et surtout ce que je suis, c’est-à-dire cette fille avec des rondeurs, un bon bonnet F en guise de tour de poitrine, et des cuisses qui se touchent.

Le jour où tous mes complexes s’envoleraient, c’est ce jour-là ou j’allais commencer à vivre.

Depuis mon plus jeune âge, j’ai toujours été la grande tige avec un véritable appétit. Une amie de la famille m’avait carrément surnommé « boyaux creux » car je mangeais tout le temps sans m’arrêter…

Aussi longtemps que je me souviennes, jamais je ne me suis sentie grosse. Au contraire, ça me passait au-dessus.

Mais… à l’aube de mes 17 ans, ce fut comme une descente aux enfers. 
Sans même que j’y réfléchisse activement, je me suis rendue compte que je passais mon temps avec des personnes en couple et surtout minces.

Un fossé s’est très vite installé entre les « autres » et « moi », et un sentiment de solitude a envahi tout mon être. Celle-ci est devenue comme une amie, quelque chose qui est tout le temps présent, qui m’accompagne partout où je vais.

Elle s’est développée en plusieurs phases. J’ai d’abord commencé à me faire vomir après chaque repas, ensuite j’ai arrêté de manger. La seule chose que je pouvais avaler, c’était du fromage blanc et de l’eau, histoire de tenir pour ne pas tomber dans les pommes, et surtout pour éviter d’inquiéter qui que ce soit, qu’on ne remarque pas que ça n’allait pas.

Et puis un soir où j’étais très malheureuse après être sortie de ma douche, je me suis vue entièrement nue. Je ne me rappelle absolument pas combien de temps je suis restée comme ça, à me regarder sans prendre totalement conscience de mes gestes…

J’ai attrapé un objet tranchant, je me suis assise par terre et j’ai commencé à mutiler mes cuisses.

À partir de ce soir-là, j’ai continué sans relâche. Sur le ventre et puis les bras, quand il n’y avait plus de place.

Je détestais tellement ce corps que je devais le punir, me punir. Agir comme ça me procurait un tel sentiment de paix avec moi-même et mon corps… Certes, je le mutilais, mais soigner mes plaies était un véritable soulagement.

Cependant, toute addiction a ses limites.

Me balader en pull alors qu’on est en été, partir de cours pour me faire du mal dans les toilettes, ou encore refuser qu’on me touche par peur que la personne soit dégoûtée de mes cicatrices…

J’avais touché le fond. J’étais un cadavre ambulant qui se haïssait.

Au bout d’un an, j’ai tenté de stopper ce cercle infernal, mais sans cesse je replongeais. Je n’avais plus aucun espoir.

Il a suffi d’une fois pour que je comprenne que j’étais en train de gâcher mes plus belles années. Cette fois-ci, j’avais coupé tellement profond que j’ai cru que j’allais y passer. Cette peur, jamais je crois que je ne pourrais l’oublier.

Elle s’est inscrite en moi.

Le lendemain, j’avais pris une décision. Il fallait que j’arrête de survivre et que, putain, je commence à vivre !

Pour m’aider à me sortir de tout ça, j’ai choisi de me tatouer deux mots, « stay strong », sur le bras. Dès lors débute une nouvelle période très difficile de ma vie : je ne devais plus me faire du mal, je devais commencer à apprendre à aimer ce corps.

Mon corps.

J’ai remplacé cette douleur par autre chose. Je me suis mise à peindre, dessiner, écrire, à faire du sport. Petit à petit, l’appétit est revenu, j’ai également commencé à voir une psychologue.

J’ai pris soin de mon corps en soignant mes plaies. Chaque année où je réussissais à ne pas me faire du mal, je me remerciais moi-même avec un tatouage qui avait du sens à mes yeux.

J’avais trouvé un sens à mon corps, celui de raconter mon histoire.

Six ans après tout ça, je ne suis plus en conflit avec mon corps.

Bien sûr, parfois j’ai encore du mal avec lui, mais les tatouages sont devenus comme des mantras : des mots que je me répète, que je vois tous les jours, qui m’aident à lâcher prise, et à tenir bon.

J’adresse mon histoire à toutes les personnes qui ont passés des soirées à pleurer, à se comparer aux autres, à s’en vouloir de manger. À celles qui ont du mal à s’aimer pour ce qu’elles sont.

Votre corps est le reflet de qui vous êtes, de votre histoire.

Il sera là du début jusqu’à la fin. Et tant que vous ne vous aimez pas vous-même, personne ne pourra vous aimer en retour.

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Témoigner sur ses complexes, ça fait quoi ?

J’ai également demandé à Chloé de faire un retour sur cette expérience : témoigner et voir son corps illustré, ça fait quoi, qu’a-t-elle ressenti ?

Participer à cette expérience me fait un bien fou ! Je trouve que l’une des choses les plus importantes dans la vie, c’est le partage !

Partager ma vie, mon ressenti, je trouve que c’est une expérience inédite qui permet de se rendre compte qu’on n’est pas tout seul.

Je me suis dit « Waouh tu n’es pas seule à galérer avec ton corps, allez viens on en discute ensemble, moi aussi je galère ».

Peut-être que des personnes qui sont passées par là, ou qui passent encore par là à l’heure actuelle, vont tomber sur mon histoire et ils se sentiront moins seules en la lisant. Peut-être comprises, aussi… Je suis vraiment très contente de participer à cette expérience.

Mettre à l’écrit ce que je pense de moi n’a pas été un exercice facile. Beaucoup de choses se sont mélangées en moi, ça a été un véritable bazar sentimental.

Cependant, petit à petit mettre de l’ordre m’a permis de me dire « ça fait déjà un an ?! », ou encore « putain… je me voyais comme ça ».

Le plus difficile pour moi a été de mettre à l’écrit la période où je me faisais du mal.

C’est toujours assez délicat, car c’est un vrai face-à-face entre ce que je me faisais subir à l’époque et maintenant. Après avoir vécu les séances avec la psy, après que mon regard a évolué, je me retrouve face à ces cicatrices que je me suis infligée.

Néanmoins, je suis fière de moi, car je peux dire la tête haute que oui je suis passée par là, mais que j’ai réussi à m’en sortir.

Certaine personne n’ont pas besoin de ça, d’autres font autre chose, chacun est différent et j’ai compris que je n’avais pas à m’en vouloir toute ma vie, ça été ma façon à moi de m’exprimer.

Écrire ma vie, écrire les étapes par lesquelles je suis passée, m’a donné un vrai sentiment d’accomplissement et de confiance en moi !

Bien sûr parfois j’ai encore du mal à me regarder sans me critiquer, mais quand ça m’arrive je relis ce que j’ai écris, je regarde mes tatouages et je me dit « Chloé tu t’en fous, t’es une battante ». Ça c’est une vrai évolution !

Honnêtement, ma première réaction a été « oh putain c’est bien mes cuisses ! ». Je trouve l’illustration hyper réaliste, j’y vois mes tatouages ainsi que mon histoire, je trouve ça vraiment agréable.

Me voir en dessin, au premier abord je trouve ça bizarre car j’ai parfois encore le mauvais réflexe de me dire « mais comment les autres me voient ? ». Pourtant très vite je me dis que… Oui c’est ton corps Chloé, c’est toi et ce que pensent les autres, ce n’est pas ton affaire. T’es belle, sexy à ta façon, et c’est tout.

C’est comme si la chanson de Katy Perry me résonnait en tête : « Baby you’re a firework, Come on, let your colors burst ».

J’ai envie de m’assumer, d’être moi-même et surtout d’oublier que les canons de beauté, qui ne sont qu’un ramassis de conneries !

L’illustration valide ce que je ressens depuis 6 ans : je deviens amie avec ce corps, que j’aurai jusqu’à la fin de ma vie. Mes tatouages sont les soutiens physiques et moraux dont j’ai besoin. Grâce à eux, j’apprécie de plus en plus ce corps.

D’ailleurs, je te remercie car ils ressortent très bien sur l’illustration et c’est très important à mes yeux, car ils font totalement partie de moi.

Encore merci de publier mon histoire !

À lire aussi : Après la haine de moi, après des scarifications… j’arrive enfin à m’aimer

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Les Commentaires

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Avatar de LisaouasiL
15 octobre 2018 à 23h10
LisaouasiL
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