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Cinéma

« Anomalisa », le film d’animation le plus original de la décennie

Akiha a vu Anomalisa, l’a trouvé « dépressivement beau » et vous conseille de ne pas passer à côté !

Disney, c’est du passé ! Charlie Kaufman et Duke Johnson réalisent Anomalisa, un film d’animation pour adultes que le magazine Esquire a sous-titré comme le film le plus humain de l’année… et franchement, je n’ai jamais été aussi d’accord. Et quand c’est un film d’animation qui remet autant en question l’humanité, je pointe carrément du doigt l’approche de l’industrie cinématographique actuellement.

Le film a été signalisé R aux États-Unis, ce qui revient à l’interdire aux moins de 16 ans chez nous — sauf que dans la réalité, il n’est doté d’aucune interdiction dans nos salles.

Anomalisa raconte une histoire très terre-à-terre. En déplacement à Cincinnati, Michael Stone, un spécialiste du service clientèle et auteur du best-seller Comment puis-je vous aider à les aider ?, retrouve une ex à son hôtel en pensant raviver la vieille flamme. Face à l’échec de cette tentative, il fait la rencontre de Lisa, représentante en pâtisseries venue pour écouter son séminaire, qui va l’extraire de la banalité de sa vie.

L’originalité d’Anomalisa ? Tout du long, on entend trois voix : celle de Michael, de Lisa, puis du reste du monde. Dit comme ça, c’est pas hyper attractif sauf la petite touche originale, mais si je vous dis que c’est Charlie Kaufman qui a écrit et réalisé le film, peut-être que vous seriez plus intéressé•e•s… Kaufman, c’est le génie derrière l’Eternal Sunshine of the Spotless Mind de Michel Gondry, ou le script alambiqué de Dans la peau de John Malkovich et forcément, il déstabilise.

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Un retour en force de Charlie Kaufman

Ça fait exactement 7 ans que Charlie Kaufman n’avait plus rien fait pour le cinéma. À vrai dire, mis à part son téléfilm en 2014, ça fait 7 ans tout court qu’il n’a rien sorti. Mais côté bizarrerie, il s’y connaît, puisqu’il a signé le script d’Eternal Sunshine of the Spotless Mind, Adaptation ou encore Synedcoche, New York (qu’il a également réalisé). Coup de théâtre – ou de cinéma – le monsieur opte pour le stop-motion pour sa nouvelle réalisation ! Et tout part d’une campagne KickStarter datant de 2012, comme de nombreux beaux projets d’aujourd’hui.

Au départ, Anomalisa

était mis en scène pour le théâtre, et Kaufman n’était pas si chaud quand Duke Johnson lui a proposé de l’adapter pour le grand écran. Mais son co-réalisateur a finir par le convaincre et heureusement, puisque le film est nommé aux Oscars pour la meilleure animation ! D’ailleurs, il a toutes ses chances contre l’autre grand favori, Vice Versa de chez Disney Pixar.

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Un univers onirique ancré dans la réalité

Kaufman flirte ici entre l’impossible et l’utopique. Trois personnes doublent tous les personnages. Derrière Michael se cache l’accent anglais de David Thewlis (professeur Lupin de Harry Potter), Lisa — seule voix optimiste du film — est doublée par Jennifer Jason Leigh, et tous les autres personnages parlent avec la voix de Tom Noonan sur un ton neutre et lisse. Quand j’ai compris ce qui se passait (car je ne savais pas du tout de quoi traitait le film quand j’y suis allée, j’avais juste trouvé le titre cool), j’ai été assez troublée, car c’est franchement dérangeant.

Imaginez un peu autour de vous que toutes les personnes que vous entendez parler ont la même voix… Comment les reconnaître ? N’est-ce pas normal de bénir la seule voix qui se distingue des autres, telle un phare dans la tempête ?

La bande-son signée Carter Burwell (nommé pour l’Oscar de la meilleure musique originale cette année pour Carol) et ne fait que renforcer l’univers onirique et émotionnel du film. À la genèse du projet, il s’agissait donc d’une pièce de théâtre avec la musique de Burwell jouée en live sur scène par un orchestre. Dans le rendu animé, les mêmes personnes reprennent leurs voix pour le film !

L’ennui, mal-être de notre société

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Michael Stone s’ennuie, il le dit lui-même. Il agit comme un type blasé et tente un peu de pimenter sa vie, mais ça s’arrête là. Jusqu’à cette fameuse nuit où il rencontre Lisa dont la voix, oh, la voix, ne ressemble à aucune déjà entendue… La solitude lui pèse d’autant plus qu’il est marié avec un enfant.

« J’ai parfois, une certaine conscience de moi-même dans le monde, un sentiment d’insécurité » (Charlie Kaufman)

Cet ennui se transforme en dépit puis en tristesse, que chacun•e d’entre nous peut le ressentir, un coup de blues devant la nostalgie du temps qui passe. Dans mon fauteuil, je me suis sentie écrasée par cette fatalité, car j’ai remarqué que de plus en plus souvent, dans ma vie, je décrochais des conversations autour de moi car elles me paraissaient dénuées d’intérêt alors que deux jours plus tôt, le même sujet était du pain bénit ! J’ignore si toutes les choses lassent plus vite, mais en tout cas, elles ne captivent pas aussi longtemps. Qui sait ce qui arrivera une fois que la nouveauté Lisa disparaîtra ?

Dans Anomalisa, la vie de Michael paraît morne au possible, malgré son succès évident. Sa joie de vivre s’est envolée, et la citation de Jean-Paul Sartre n’aura jamais été aussi pertinent : l’enfer, c’est les autres. Ce malaise existentiel nous rapproche de Michael mais nous en éloigne en même temps, selon la vision de Kaufman. Du mépris à la pitié envers son personnage, ce qui est sûr c’est que son malheur représente un mal de notre société.

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Frissonnant de réalisme

Des marionnettes fabriquées grâce à une imprimante 3D, c’est ce qui donne un certain réalisme à Anomalisa. En fait, les personnages ressemblent tout simplement à des êtres de chair et de sang et du coup, bonjour le malaise… Logiquement, ça explique en fait le signal R outre-Atlantique, car une scène en particulier est assez graphique et avec des marionnettes aussi réalistes, la frontière est mince dans l’esprit des plus jeunes. L’animation en elle-même relève de la prouesse technique avec un stop-motion fluide et bien proportionné.

Ce n’est pas la première fois que Charlie Kaufman flirte avec l’inanimé puisque le héros de Dans la peau de John Malkovich se trouvait justement être un marionnettiste ! Cet usage d’un être factice pour refléter l’humanité remet carrément en perspective notre propre place et impuissance. L’anomalie du film amène un souffle frais dans le cinéma américain un peu uniforme…

En conclusion, je préviendrai que comme je flippe pour un rien devant les films, il y a une scène qui m’a particulièrement dérangée, mais Anomalisa se hisse sans difficulté comme une claque visuelle et comme un film d’auteur qui va rester dans les annales.


Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.

Les Commentaires

4
Avatar de dyspeptique
4 février 2016 à 11h02
dyspeptique
Je suis allée voir ce film hier et franchement, je n'ai pas accroché. L'ambiance est déprimante (cela dit c'était voulu donc pour le coup c'est bien rendu) et on n'échappe pas à l'éternel plan pisse, ce plan où notre héros est montré en train d'uriner, histoire de montrer que c'est un homme vulnérable. Je me suis ennuyée profondément pendant la première partie du film, et le reste était passable, mais sans plus non plus. Je m'attendais peut-être à beaucoup plus de situation bizarres, décalées ou absurdes. J'ajouterais que la scène de sexe m'a particulièrement incommodée, je ne savais pas qu'il y en aurait une, et on a droit à tout les bruits mouillés possibles.

Contenu spoiler caché.

Plusieurs personnes sont parties durant la séance, ce film n'est donc pas fait pour tout le monde en tout cas. Pour ma part, j'ai tenu jusqu'au bout pour être sûre de me faire un avis qui ne soit pas trop partial, mais je les aurais bien suivies.
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